Madrid (awp/afp) - Nouveau bouleversement en vue dans le paysage bancaire espagnol: le groupe BBVA a annoncé mardi avoir pris contact avec sa concurrente Sabadell pour discuter d'une "possible fusion", trois ans et demi après l'échec d'un premier projet de rapprochement.

"BBVA confirme avoir fait part au président du conseil d'administration de Sabadell" de sa volonté d'"ouvrir des négociations en vue d'étudier une éventuelle fusion entre les deux entités", a indiqué la banque dans un communiqué envoyé au gendarme boursier espagnol (CNMV).

Dans une courte note envoyée également à la CNMV, le groupe Sabadell a confirmé "avoir reçu" une "proposition écrite" de BBVA "en vue d'une fusion". "Le conseil d'administration de Banco Sabadell analysera de façon adéquate tous les aspects de la proposition", est-il précisé.

BBVA, présente en Espagne mais aussi au Mexique, en Argentine ou encore en Turquie, est le deuxième groupe bancaire espagnol en terme de capitalisation et en nombre de clients (74,1 millions). Quatrième banque du pays, Sabadell compte quant à elle près de 20 millions de clients et opère dans 14 pays.

La fusion entre les deux entités donnerait naissance à un mastodonte bancaire, susceptible de rivaliser avec Santander, première banque espagnole avec près de 166 millions de clients dans le monde, mais aussi avec les principales banques européennes, comme HSBC ou BNP Paribas.

"Le gros mange le petit"

L'annonce de leur possible fusion a néanmoins été accueillie de façon contrastée à la Bourse de Madrid, où le titre Sabadell a clôturé en hausse de 3,37%, quand celui de BBVA a perdu 6,51%. Un contraste dû, selon les analystes, au déséquilibre de l'opération.

"Plutôt qu'une fusion entre égaux, il s'agit d'une prise de contrôle dans laquelle le gros poisson (BBVA) mange le petit (Sabadell)", estime Ricardo Zion, professeur à l'EAE Business School de Barcelone, pour qui Sabadell - sommée de grossir pour "survivre" - a plus à gagner.

"Du point de vue commercial, la stratégie" des deux groupes "ne semble pas très claire" car "Sabadell est très axée sur les activités nationales" alors que "BBVA a une forte présence internationale, en particulier en Amérique latine et en Turquie", ajoute par ailleurs l'économiste.

Le groupe BBVA, originaire du Pays basque (nord de l'Espagne), avait déjà annoncé un projet de fusion avec sa concurrente Sabadell, basée à d'Alicante (sud-est), en novembre 2020. Le but affiché était alors de mieux résister à la crise économique provoquée par la pandémie de Covid-19.

Mais ce projet avait finalement été abandonné dix jours plus tard, faute d'"accord sur l'éventuel échange d'actions entre les deux entités", selon Sabadell, à l'origine de cet échec: la quatrième banque espagnole avait alors jugé l'offre insuffisante.

Vagues de consolidation

Après cet échec, Sabadell et BBVA avaient engagé des plans de restructuration, avec à la clé plusieurs milliers de suppressions d'emplois. Un épisode qui appartient désormais au passé: les deux groupes ont retrouvé des couleurs ces derniers mois, comme l'ensemble du secteur bancaire espagnol.

BBVA, présidé par Carlos Torres Vila, a ainsi annoncé lundi avoir dégagé 2,2 milliards d'euros de profits au premier trimestre, soit 19% de plus que sur les trois premiers mois de 2023. Son produit net bancaire - équivalent de son chiffre d'affaires - a lui grimpé de 15,4% à 6,51 milliards d'euros

Le groupe Sabadell, dirigé par Josep Oliu, a quant à lui annoncé la semaine dernière avoir dégagé 308 millions d'euros de résultat net au premier trimestre, soit 50% de plus que début 2023. Il s'agit du bénéfice trimestriel le plus élevé de son histoire.

Le secteur bancaire espagnol avait connu une première vague de consolidation durant la crise financière de 2008, avec la quasi disparation des caisses d'épargne provinciales, en grande difficulté, alors absorbées par les poids lourds du secteur.

Ce phénomène s'est prolongé en 2021 avec le rachat de Bankia par Caixabank qui a donné naissance au troisième groupe bancaire espagnol, puis avec celui de Liberbank par Unicaja, aujourd'hui cinquième banque du pays.

afp/rp