La décision du président Joe Biden de suspendre la livraison de munitions à forte charge à Israël a été prise en raison d'une éventuelle offensive israélienne à Rafah qui, selon Washington, pourrait mettre en danger les civils palestiniens, a déclaré mercredi le secrétaire à la défense, Lloyd Austin.

M. Austin a été le premier haut fonctionnaire de l'administration Biden à expliquer publiquement ce qui semblait être un changement possible de la politique américaine en matière d'armement d'Israël. M. Biden s'était engagé à soutenir pleinement Israël à la suite de l'attaque lancée le 7 octobre contre le pays par le groupe militant palestinien Hamas, et il avait envoyé à l'allié le plus proche de Washington au Moyen-Orient des armes d'une valeur de plusieurs milliards de dollars.

M. Austin a souligné que l'engagement des États-Unis en faveur de la défense d'Israël restait "inébranlable" et que la décision de suspendre la livraison de munitions n'était pas définitive.

Il a toutefois précisé que les États-Unis préféraient qu'aucun combat majeur n'ait lieu à Rafah et qu'au minimum, toute opération israélienne devait protéger la vie des civils.

"Nous avons été très clairs (...) depuis le début : Israël ne doit pas lancer d'attaque majeure à Rafah sans prendre en compte et protéger les civils qui se trouvent dans cet espace de combat", a déclaré M. Austin lors d'une audition au Sénat.

"Une fois encore, après avoir évalué la situation, nous avons interrompu un envoi de munitions à forte charge", a-t-il déclaré lors d'une audition au Sénat.

"Nous n'avons pas encore pris de décision définitive sur la suite à donner à cette livraison.

Israël a menacé de lancer un assaut majeur sur Rafah pour vaincre les milliers de combattants du Hamas qui, selon lui, s'y sont retranchés, mais les pays occidentaux et les Nations unies affirment qu'une attaque de grande envergure sur la ville déclencherait une catastrophe humanitaire.

L'attaque du Hamas du 7 octobre a fait environ 1 200 morts et 250 personnes ont été enlevées, dont 133 seraient toujours en captivité à Gaza, selon les décomptes israéliens.

La campagne israélienne visant à détruire le Hamas a débouché sur une campagne militaire de sept mois qui a tué jusqu'à présent 34 789 Palestiniens, pour la plupart des civils, selon le ministère de la santé de Gaza.

PRESSION

Le conflit a également laissé une grande partie des 2,3 millions d'habitants de Gaza au bord de la famine et a déclenché des manifestations aux États-Unis exigeant que les universités et M. Biden retirent leur soutien à Israël, y compris la fourniture d'armes. M. Biden fait également l'objet de pressions de la part des démocrates, y compris de législateurs de son parti, pour qu'il fasse davantage pression sur Israël.

Un haut fonctionnaire américain, s'exprimant mardi sous le couvert de l'anonymat, a déclaré que Washington avait soigneusement examiné la livraison d'armes susceptibles d'être utilisées à Rafah, et qu'en conséquence, il avait mis en pause une cargaison composée de 1 800 bombes de 2 000 livres et de 1 700 bombes de 500 livres.

M. Austin n'a pas précisé la taille ni le nombre des munitions concernées.

Le sénateur républicain Lindsey Graham a fait partie des républicains qui ont réprimandé l'administration Biden pour cette décision.

"C'est obscène. C'est absurde. Donnez à Israël ce dont il a besoin", a déclaré M. Graham, ajoutant qu'il n'appartenait pas à Washington de remettre en question la façon dont Israël menait la guerre contre les militants du Hamas, déterminés à détruire Israël.

La sénatrice américaine Deb Fischer, qui siège à la commission des forces armées du Sénat, a demandé à M. Biden de renoncer à "son maintien pour des raisons politiques".

"Le soutien américain à Israël ne peut être mis en doute, surtout en ce moment", a-t-elle déclaré.

Pour sa part, l'armée israélienne a semblé, mercredi, minimiser le blocage de la livraison d'armes, affirmant que les alliés résolvaient tout désaccord "à huis clos".

S'exprimant lors d'une conférence organisée par le journal Yedioth Ahronoth, alors que la guerre de Gaza entrait dans son huitième mois, le porte-parole militaire en chef, le contre-amiral Daniel Hagari, a décrit la coordination entre Israël et les États-Unis comme atteignant "une ampleur sans précédent, je pense, dans l'histoire".