Madrid (awp/afp) - Près de quatre ans après une première tentative de rapprochement ratée, la banque espagnole Sabadell a annoncé lundi rejeter une nouvelle offre de fusion présentée par sa concurrente BBVA, censée donner naissance à un géant bancaire européen.

Nouvelle fin de non-recevoir à la demande de sa compatriote: "après une analyse détaillée de la proposition, le conseil d'administration" de Sabadell "a conclu que la proposition ne répondait pas aux intérêts" de la banque "et de ses actionnaires", a annoncé le groupe dans un communiqué.

L'organe de direction de la quatrième banque espagnole a en effet estimé, à l'issue d'une réunion extraordinaire, que l'offre de BBVA sous-évaluait "de manière significative" sa valeur "et ses perspectives de croissance en tant qu'entité indépendante", selon le communiqué.

Il a souligné avoir en outre "pleinement confiance dans la stratégie de croissance et dans les objectifs financiers" de l'entreprise, assurant que Sabadell, en tant que banque indépendante, "générera plus de richesse pour ses actionnaires".

Pour ces différentes raisons, le conseil d'administration n'a pu que "rejeter la proposition de BBVA", explique le groupe originaire de Catalogne, qui défend une décision "conforme aux intérêts des clients et des employés" eux-mêmes.

Dans une courte réaction transmise lundi soir à l'AFP, BBVA a dit "regretter" le fait que Sabadell "ait rejeté une offre aussi attrayante".

Le deuxième groupe bancaire d'Espagne, originaire lui du Pays basque, avait annoncé mardi dernier avoir pris contact avec sa concurrente afin de discuter d'une "possible fusion" susceptible de créer "l'une des institutions financières les plus importantes" d'Europe.

Ce rapprochement permettra la création d'une entité "plus solide et efficace", grâce à la "complémentarité" des deux entreprises, avait justifié la banque, en promettant d'éviter les "mesures traumatisantes ou affectant singulièrement les salariés".

"Fermetures d'agences" et "licenciements" ___

BBVA avait tenté une première fois d'absorber Sabadell en novembre 2020, afin de faire face aux défis provoqués par la pandémie de Covid-19. Mais ce projet avait été abandonné dix jours plus tard, en raison d'une offre jugée déjà insuffisante par Sabadell.

La nouvelle proposition de BBVA prévoyait, cette fois-ci, de réaliser une fusion via une augmentation de capital, avec un échange d'une action nouvelle de BBVA contre 4,83 titres Sabadell, soit une prime de 30% par rapport au cours de clôture de Sabadell le 29 avril.

Les actionnaires du groupe fondé dans la banlieue de Barcelone, valorisée à près de 11,5 milliards d'euros, auraient ainsi détenu 16% du futur géant bancaire, d'après BBVA, qui avait assuré vouloir "préserver la culture des deux entités".

Soucieux de convaincre sa concurrente, le groupe basque avait prévu un double siège pour la future entité: l'un à Madrid et l'autre à Barcelone. Un dirigeant de BBVA en aurait occupé la présidence, et un responsable de Sabadell la vice-présidence.

BBVA est la deuxième banque espagnole en termes de capitalisation (60 milliards d'euros) mais aussi de clients (74,1 millions). Sabadell est pour sa part quatrième, avec 20 millions de clients et 9,8 milliards de capitalisation.

Leur fusion aurait donné naissance à un groupe capable de rivaliser avec Santander, première banque espagnole avec 72 milliards d'euros de capitalisation et 166 millions de clients, mais aussi avec les autres géants européens, comme HSBC ou BNP Paribas.

L'annonce de BBVA, ces derniers jours, avait toutefois fait naitre des craintes, notamment chez les syndicats et au sein du gouvernement espagnol, qui avaient dit s'inquiéter d'une trop grande concentration du secteur bancaire et de possibles suppressions d'emplois.

"Normalement, ces fusions sont utilisées pour fermer des agences, procéder à des licenciements importants (...) Je sais très bien comment cela fonctionne", avait ainsi assuré la ministre du Travail Yolanda Diaz, numéro trois du gouvernement de Pedro Sánchez.

Le secteur bancaire espagnol a connu une importante consolidation depuis la crise financière de 2008, marquée par la quasi disparation des caisses d'épargne provinciales, absorbées par des concurrents. Ce phénomène s'est traduit par des dizaines de milliers de suppressions d'emplois.

afp/rp