Le Figaro Economie tente de nous répondre ce jour en évaluant l'impact économique d'une victoire des Bleus en finale : «S'ils devaient soulever le trophée au terme de la finale dimanche, les joueurs de l'équipe de France de football pourraient donner, sans le vouloir, un coup de pouce à l'économie française. Les Bleus auront sans doute autre chose à l'esprit lors du coup d'envoi de la finale de la Coupe du monde, dimanche à Moscou. «Je ne vais pas vous chiffrer les points de PIB, mais c'est bon pour la croissance», s'enthousiasmait déjà, un économiste…

Alors combien ? 0,2% de croissance en plus en sortie de l'été, un moral à toutes épreuves, une envie subite d'entreprendre, la France, comme marqueur d'une fierté renouvelée. Tout cela compte et surtout, tout cela peut se voir. Donc nous y sommes. Mais le football ne peut pas nous exfiltrer de la réalité économique dans laquelle nous vivons. Il nous faut trouver d'autres sources de croissance. Au moins un paradigme, une vertu pour les années à venir, il suffit alors de lire le Quotidien Les Echos pour deviner, imaginer, comprendre, enfin, ce qui peut nous faire faire un bond vers le futur. Le capitalisme manque de projets. Les entreprises rendent l'argent aux actionnaires plutôt que de l'investir là où il serait utile de le faire. Seule la transition écologique pourrait le rassasier.

Le capitalisme se mord la queue. Faute de projet, il en vient à dévorer son capital. Ce qui représente une vraie menace sur l'avenir, car le capitalisme porte une formidable efficacité économique. « Nous lui devons largement la fabuleuse progression des conditions de vie depuis deux siècles. Même ses contempteurs les plus féroces, comme le sociologue suisse Jean Ziegler, le concèdent. Le capitalisme a pourtant devant lui un magnifique chantier. Mais il ne pourra s'en emparer tout seul. Il devra être sauvé par ses ennemis, comme il l'a déjà été à plusieurs reprises dans le passé ». Un discours renouvelé, changeant, passionnant que le quotidien économique développe…

« Commençons par nous entendre sur les mots, car nous sommes ici dans le moulin à fantasmes. L'essayiste anarchiste Pierre-Joseph Proudhon a donné une définition limpide du capitalisme il y a plus d'un siècle et demi : « régime économique et social dans lequel le capital comme source de revenus n'appartient généralement pas à ceux qui l'utilisent dans leur propre travail. » L'historien Fernand Braudel a ensuite dissipé la confusion fréquente entre économie de marché, espace de concurrence (où la pente est la « baisse tendancielle du taux de profit » pointée par Karl Marx), et le capitalisme, « étage supérieur » dominé par des monopoles (où la pente naturelle est l'accumulation, aussi pointée par Marx et mise en évidence récemment par les travaux de Thomas Piketty).

Si le capitalisme est redoutablement puissant, c'est parce qu'il permet d'accumuler du capital, et que ce capital est ensuite investi là où il est le plus efficace - machines, infrastructures de transport, recherche, etc. Il est tellement puissant qu'il ne peut pas exister sans opposants - Etat, syndicats, intellectuels. « Sans cette présence de contrepouvoirs, le capitalisme disparaîtrait dans son excès de pouvoir, par les déséquilibres de revenus, les pertes de production et les révolutions qui en découleraient », explique Sébastien Groyer, qui est à la fois philosophe et capital-risqueur, dans sa thèse passionnante. «Or, aujourd'hui, le capitalisme a perdu le nord. Il ne sait plus où aller. Pour être plus précis, les acteurs du capitalisme - dirigeants d'entreprise et grands investisseurs - ne savent plus quoi faire des masses d'argent qu'ils font circuler. Ils n'ont plus de grands projets. Du coup, cet argent revient aux actionnaires. Au lieu de lever de l'argent en émettant de nouvelles actions pour financer leur essor, les entreprises rachètent leurs vieilles actions. A lui seul, le géant du numérique Apple a annoncé un « buy back » de 100 milliards de dollars ». Ce n'est pas rien ! Une finale, un Mondial et subitement, l'envie de changer les choses…

Christian Moguérou

La Sté Crédit Agricole SA a publié ce contenu, le 12 juillet 2018, et est seule responsable des informations qui y sont renfermées.
Les contenus ont été diffusés par Public non remaniés et non révisés, le12 juillet 2018 09:58:03 UTC.

Document originalhttps://www.credit-agricole.com/en/news-channels/the-channels/group-news/world-cup-final-green-etc

Public permalinkhttp://www.publicnow.com/view/FB9D0AB537E9A216505F9D7D381F899C66DD8F73