par Michael Flaherty

Dans un avis d'introduction en Bourse de plus de 1.000 pages, le géant mondial de l'aluminium a pour la première fois rendu public des informations financières clés et détaillées, qui ont mis en lumière un premier semestre 2009 difficile.

L'introduction à Hong Kong du groupe contrôlé par le milliardaire russe Oleg Deripaska constituerait l'une des plus importantes par la taille d'une entreprise non asiatique sur cette place financière et la première double cotation d'une société à Hong Kong et Paris.

En l'espèce, Rusal a indiqué qu'il prévoyait d'émettre 1,6 milliard d'action à un prix unitaire compris entre 9,10 et 12,50 dollars hong-kongais, soit la possibilité pour le groupe russe de lever entre 1,87 milliards et 2,58 milliards de dollars américains.

L'introduction de Rusal, prévue pour le 27 janvier, valoriserait le groupe en Bourse à près de 26 milliards de dollars. A titre de comparaison, Alcoa, autre producteur important d'aluminium, est valorisé 15,6 milliards de dollars.

Compte tenu de la fourchette de prix indicative, le groupe russe serait valorisé entre 11 et 14 fois son ratio EV/Ebitda (valeur d'entreprise sur résultat brut d'exploitation) 2010, contre 12 fois pour Aluminium Corporation of China, selon une source proche de la transaction.

PERTE DE 868 MILLIONS DE DOLLARS AU PREMIER SEMESTRE

En début de semaine, plusieurs sources avaient confié à Reuters que le projet d'introduction de Rusal attirait d'importants investisseurs, dont la société d'investissement du britannique Nathaniel de Rothschild, l'homme d'affaires sino-malaisien Robert Kuok Hock Nien, ainsi que le fonds américain Paulson & Co.

Pour autant ce projet ne se concrétise pas sans heurts. Il a notamment été retardé par les autorités hong-kongaises inquiètes du niveau élevé d'endettement du groupe russe.

Les régulateurs ont en outre interdit l'ouverture de l'introduction de Rusal aux particuliers, qui peuvent habituellement acquérir au moins 10% des titres d'une introduction en Bourse. C'est la première fois qu'une telle décision est prise.

"Compte tenu du niveau élevé d'endettement de Rusal et de l'offre excédentaire dans le secteur de l'aluminium, (cette introduction) n'est pas attractive pour les investisseurs qui se fondent sur l'analyse fondamentale", estime Steven Leung, directeur des ventes institutionnelles chez UOB-Kay Hian.

Dans son avis d'introduction en Bourse, Rusal a publié des éléments clés et des données attendues depuis longtemps, notamment la somme des dettes du groupe et les facteurs qui pourraient peser sur la restructuration de cette dette et son avenir financier, comme la chute de plus de 20% des prix de l'aluminium.

L'entreprise a en l'occurrence enregistré une perte de 868 millions de dollars au cours des six mois clos au 30 juin, contre un bénéfice de 1,41 milliard un an plus tôt.

La société prévoit cependant un bénéfice annuel pour 2009 "de pas moins de" 434 millions de dollars.

Le chiffre d'affaires 2008 était ressorti à 15,69 milliards de dollars, soit deux milliards de plus que lors de l'exercice précédent. Mais en juin, il n'était que de 3,76 milliards de dollars contre 8,35 milliards pour la même période il y a un an.

En octobre 2010, Rusal devra en outre rembourser un prêt de 4,5 milliards de dollars à la banque publique russe VEB.

Parmi les autres créanciers du groupe figurent BNP Paribas, Calyon (Groupe Crédit agricole) et la Société générale, exposés respectivement à hauteur de 415 millions de dollars, 507 millions et 401 millions.

(Toutes les données sont exprimées en dollars américains sauf mention contraire.)

Version française Alexandre Boksenbaum-Granier