Paris (awp/afp) - Amoindri mais pas désarmé, un "nouveau Suez" est né officiellement mardi, fort d'une "taille critique" et d'"équipes passionnées" nécessaires à son rebond, assure à l'AFP Sabrina Soussan, sa nouvelle directrice générale. "Suez ouvre une nouvelle page de son histoire", a annoncé le groupe français mardi.

Quelque 40% des titres du vénérable de l'eau et des déchets, acquis par le rival Veolia au terme d'une spectaculaire OPA, ont été rétrocédés lundi à un groupe de repreneurs, qui se sont engagés à maintenir et développer la nouvelle entité.

"Avec 35'000 salariés et 7 milliards d'euros de chiffre d'affaires, on a une taille critique. Dès lors, si vous vous différenciez, vous pouvez croître, d'autant plus quand vous avez les moyens de vos ambitions, comme c'est le cas de Suez avec ses actionnaires", a dit à l'AFP Mme Soussan, attendue mardi au siège, toujours à la Défense, dans la tour Suez.

La directrice générale hérite d'un groupe secoué par une bagarre intense pour tenter d'échapper à Veolia, qui s'est soldée par un accord de partage après la médiation menée par un de ses anciens patrons.

Ce Suez est détenu désormais par les fonds français Meridiam et américain GIP pour 39% chacun, avec la Caisse des dépôts/CNP Assurances à hauteur de 20%, le reste allant à l'actionnariat salarié. Le groupe redessiné garde quasiment toutes ses activités en France, représentant 5 milliards d'euros de chiffre d'affaires et 25'000 salariés. Il sauve aussi une présence à 2 milliards d'euros en Italie, Chine, Australie, Sénégal, Maroc, Inde...

Suez "conserve de réelles perspectives de croissance et de véritables capacités d'innovation en France et à l'international", a souligné Veolia mardi, reprenant là les mêmes termes que le communiqué de Suez.

Mais où et sur quoi concentrer la stratégie à venir? L'annonce se fera "autour de l'été", promet Mme Soussan.

"Le monde est vaste, et ce marché est en croissance, il y a beaucoup d'opportunités, il va falloir regarder où, on ne pourra tout faire à la fois. En tout cas nous avons les moyens de nos ambitions, des actionnaires de long terme et de fortes capacités d'investissement", relève-t-elle.

"Aller de l'avant"

Les actionnaires ont assuré mardi qu'ils seraient "aux côtés des 35'000 collaborateurs", "pour un projet de croissance fédérateur et ambitieux". "Ce projet développera le groupe, dans ses deux métiers historiques, l'eau et les déchets, en France comme à l'international. Avec Sabrina Soussan, nous avons nommé une dirigeante de culture internationale et expérimentée", ajoutent-ils.

La première tâche pour la responsable, qui a fait une bonne partie de sa carrière chez Siemens, en Allemagne et en Suisse, sera de former une équipe dirigeante: "Une équipe soudée, qui permet de décupler le potentiel, un mix de sang neuf et de personnes venues de l'interne".

Elle ne craint pas le manque de candidats. "Suez a d'énormes opportunités, nous sommes au coeur de la transition écologique, nous avons une mission particulière, qui peut attirer beaucoup de talents, et notamment de jeunes talents."

"J'ai vu (chez Suez) beaucoup de gens passionnés, qui adorent leur métier. Les 18 derniers mois n'ont pas été faciles. Le passé, personne ne peut le changer, mais on peut construire l'avenir. Tous ceux que j'ai vus veulent aller de l'avant", dit-elle.

Elle ne craint pas plus le mastodonte Veolia, désormais cinq fois plus gros que Suez. "Ce marché est très fragmenté, le plus grand acteur sera à 5% de parts de marché, donc la taille n'est pas forcément le plus important."

Pour elle, "les équipes et la proximité avec le client vont faire le succès de l'entreprise. L'idée est de co-créer avec le client: ne pas faire de l'innovation pour l'innovation, mais répondre aux besoins. C'est ce que j'ai fait dans l'automobile et les transports, et cela fait une grande différence".

Cette ingénieure de formation, spécialité mécanique et aéronautique, a déjà surmonté d'autres défis professionnels, relate-t-elle.

Chez Siemens Automotive, face à Bosch 4 à 5 fois plus gros, "on s'est différencié car nous étions une équipe soudée, flexible, à l'écoute du client, avec des processus de réponse rapide... Vous comprenez mon point ?! Et bien nous avons significativement accru nos parts de marché!"

Dans le rail, chez Siemens à nouveau, ce fut la relance des trains régionaux. "Des gens venus d'un autre secteur, avec un oeil nouveau, cela peut contribuer à créer beaucoup de valeur", note Sabrina Soussan.

Le conseil du groupe devrait par ailleurs élire son président. Le patron de Méridiam, Thierry Déau, est pressenti.

afp/buc