(Actualisé avec informations de la Welt am Sonntag)

BERLIN, 15 octobre (Reuters) - Djaber Albakr, le réfugié syrien soupçonné de projeter un attentat dans l'un des aéroports de Berlin, était en communication avec le groupe Etat islamique et a passé une nuit dans la capitale allemande, où il a rencontré un contact, au cours de la deuxième quinzaine de septembre, rapportent samedi des médias allemands.

D'après la Welt am Sonntag, il a eu des discussions téléphoniques répétées avec un membre de l'EI en Syrie jusqu'à la veille de la perquisition policière qui a permis de mettre la main sur des explosifs dans son appartement de Chemnitz, dans le land de Saxe, et a lancé la traque.

Albakr, qui s'était réfugié en Allemagne en février 2015 et y avait obtenu l'asile provisoire quatre mois plus tard, a été capturé dans la nuit de dimanche à lundi par la police deux jours après la découverte de ces explosifs.

Il s'est suicidé deux jours après son arrestation en se pendant avec son tee-shirt dans sa cellule à Leipzig. Sa mort a exposé la police et la justice saxonnes au feu de la critique.

Citant des sources proches de l'enquête, le quotidien Welt am Sonntag rapporte que plusieurs conversations entre Albakr et un membre de l'EI en Syrie ont été interceptées par le renseignement américain, qui a alerté la sécurité allemande.

Dans ces discussions, poursuit la Welt am Sonntag, Albakr évoque ses projets d'attentat. Dans un appel intercepté le 7 octobre, soit la veille de la perquisition, il informe son interlocuteur avoir préparé 2 kg d'explosifs et indique qu'un "gros aéroport de Berlin" serait "mieux que des trains".

En juillet, l'EI a revendiqué des attaques à bord d'un train près de Würtzbourg et lors d'un festival musical à Ansbach qui ont fait vingt blessés.

Le Berliner Morgenpost et la station régionale RBB indiquent pour leur part qu'il a passé une nuit à Berlin durant la seconde quinzaine de septembre et qu'il y a rencontré un contact. Il a également visité un des deux aéroports de la capitale allemande, ajoutent ces médias qui ne précisent pas lequel.

RADICALISÉ PAR DES IMAMS BERLINOIS ?

Dans une interview accordée par téléphone à Reuters depuis le village de Sa'sa, au sud-ouest de Damas, son frère, Alaa, a déclaré que Djaber Albakr s'était rendu en Turquie il y a sept mois. "Puis il a passé deux mois en Syrie. Il nous a appelés pour nous dire qu'il était engagé volontaire avec les Casques blancs (ndlr, groupe de protection civile) à Idlib (une ville du nord-ouest de la Syrie sous le contrôle des insurgés islamistes)".

Mais Alaa Albakr estime que son frère a été radicalisé par des imams exerçant à Berlin et qui l'ont convaincu de retourner en Syrie pour participer au djihad. "Nous pensons que c'est pour cela qu'il est retourné en Syrie", a-t-il dit.

Djaber, a-t-il ajouté, était un musulman pieux qui voulait suivre des études universitaires. Ce n'est qu'à la fin de l'année dernière qu'il a commencé à montrer des signes de radicalisation en se mettant à poster des vidéos et des chants djihadistes sur les réseaux sociaux.

"Il y a six semaines, poursuit Alaa, il m'a appelé pour me dire qu'il voulait finir ses études. Il a tenté de me convaincre de venir en Allemagne avec ma femme et mes cinq enfants."

Alaa Albakr ne croit pas au suicide de son frère, ni même à son implication dans un projet d'attentat en Allemagne. Pourquoi, demande-t-il, vouloir attaquer un pays qui l'a aidé ainsi que plusieurs milliers d'autres Syriens alors qu'il aurait pu frapper des soldats fidèles à Bachar al Assad en Syrie ? "Cela n'a pas de sens."

"J'ai été soulagé lorsque j'ai lu qu'il avait été arrêté. J'ai pensé qu'il était désormais en sécurité et que son innocence serait démontrée", dit-il. "C'était un musulman pieux, et les musulmans pieux ne se suicident pas." (Michelle Martin et Joseph Nasr; Jean-Stéphane Brosse et Henri-Pierre André pour le service français)