(Répétition date)

* Hollande compte sur la pédagogie pour remonter la pente

* "L'Elysée a perdu sept mois", dit Séguéla

* Sérillon, nouveau venu dans le pôle communication

par Elizabeth Pineau

PARIS, 7 janvier (Reuters) - "La communication, c'est la politique" : ces mots de François Hollande illustrent le souci présidentiel de tenter de faire oublier un début de quinquennat cacophonique qui a contribué à brouiller son message et nourri son impopularité.

"L'Elysée a perdu sept mois. La communication est un métier, donc ne pas vouloir le faire - comme François Mitterrand avec Jacques Pilhan, Jacques Chirac avec sa fille, Nicolas Sarkozy avec Franck Louvrier - est une faute professionnelle", juge sévèrement le publicitaire Jacques Séguéla.

L'ancien conseiller de François Mitterrand devenu "sarkozyste" reproche à l'actuel président de s'être entouré de "gens dont ce n'était ni la fonction affichée, ni le métier".

"Il faut être un communicant politique et non pas un politique communiquant, voilà l'erreur qui a été faite", a-t-il dit à Reuters.

Après des mois de communication flottante, notamment marquée par la mauvaise gestion du sauvetage du site sidérurgique de Florange, la fin d'année a été mieux programmée : interview présidentielle à la radio, visite de terrain à Rungis, voeux télévisés et double séminaire sur l'emploi à l'Elysée et Matignon. (Voir et )

Une séquence rythmée et classique qui n'a toutefois guère convaincu les Français : selon plusieurs sondages, une large majorité n'a pas trouvé François Hollande convaincant dans ses voeux et juge trop ambitieux ses objectifs de ramener le déficit à 3% du PIB et de faire baisser le chômage d'ici fin 2013.

Le tout sur fond de polémique concernant le réaménagement de la taxe à 75% pour les plus riches et d'exil vers la Russie de l'acteur français Gérard Depardieu.

LES 75%, "UNE FISCALITÉ REVANCHARDE"

Jacques Séguéla considère les 75% comme "une faute de communication dès le départ", donnant l'impression d'une "fiscalité revancharde".

"Les gens se sentent concernés alors que ça ne devrait toucher que mille personnes, tout ça pour 200 millions !", déplore-t-il à propos de cette promesse de campagne de François Hollande.

"Ils auraient dû trouver une autre astuce pour remettre (le candidat du Front de gauche Jean-Luc) Mélenchon à sa place et renvoyer Sarkozy dans ses 22 de président des riches. Ils en paient aujourd'hui le prix en boomerang".

Samedi dans l'Eure, François Hollande se posait en garant d'une politique de vérité, à l'image de ce que prônait l'ancien président du conseil Pierre Mendès-France à qui le chef de l'Etat a rendu hommage dans sa ville de Louviers.

"Moi je considère que la communication, c'est la politique", a dit le président de la République devant la presse.

"Les Français sont suffisamment lucides pour savoir que ce qui compte, au-delà des paroles, ce sont les actes, et il n'y a pas de mise en scène, pas de manière de faire, il n'y a qu'une façon d'être sincère, c'est de montrer ce que l'on fait peut être utile", a-t-il poursuivi.

"En campagne pour le pays", il promet de se déplacer en région une fois par semaine en moyenne, sans se laisser enfermer à l'Elysée ou happer par ses obligations internationales.

Le président sera mercredi à Orléans pour les voeux aux armées, jeudi à Bordeaux sur le thème des investissements d'avenir, samedi à Marseille pour ses voeux au monde la culture.

Son calendrier mentionne une visite aux Emirats arabes unis en début de semaine prochaine, puis à Berlin le 22 pour le 50e anniversaire du Traité de l'Elysée.

"LA PROXIMITÉ, CE N'EST PAS D'ALLER SERRER DES MAINS"

Au regard d'un "agenda extrêmement chargé", il a renoncé à se rendre en Amérique latine à la fin du mois pour un voyage qui l'aurait tenu longtemps loin de l'Hexagone.

C'est donc le Premier ministre qui se rendra en Argentine et au Chili du 24 au 28 janvier pour participer notamment, à Santiago du Chili, au sommet Communauté des États latino-américains et des Caraïbes-Union européenne (Celac-UE).

Mais pour Jacques Séguéla, multiplier les déplacements de terrain "est une erreur dramatique et fondamentale".

"Nicolas Sarkozy a fait 500 déplacements en province, 100 par an, il n'a pas été plus aimé des Français pour ça. François Mitterrand en a fait moins et il a été aimé des Français", fait-il valoir.

"La proximité, ce n'est pas d'aller serrer des mains, c'est d'agir sur les attentes des Français. Tout déplacement doit s'accompagner d'une proposition", souligne-t-il, citant au passage un proverbe japonais : "Avant de parler, assure-toi que ce que tu vas dire est plus beau que le silence".

Il approuve en revanche l'arrivée de l'ancien présentateur de journal télévisé, Claude Sérillon, pour "renforcer", selon la formule officielle, le pôle communication de l'Elysée.

"C'est courageux d'avoir accepté ce job", dit-il. "Il a l'étoffe pour ça. Communiquer, c'est aller au plus près du journalisme, c'est-à-dire créer l'évènement".

Le publicitaire conseille à l'entourage de François Hollande de respecter la règle des trois "C" : cohérence du message, convergence de tous les émetteurs et créativité.

C'est sur le deuxième point que le publicitaire a le plus de doutes, au regards des sorties intempestives et autres messages dissonants de ministres qui ont émaillé ce début de mandat : "Ils sont fous, par moments on dirait qu'ils le font exprès pour assassiner le président !" (Edité par Yves Clarisse)