(Actualisé avec déclarations turques, ministère russe de la Défense, précisions)

par Ellen Francis

BEYROUTH, 25 novembre (Reuters) - Plus de 100 personnes ont été blessées samedi soir à Alep, dans le nord-ouest de la Syrie, lors d'une attaque présumée au gaz toxique que le gouvernement syrien et son allié russe ont attribuée aux insurgés.

Selon un responsable des services de santé à Alep, les victimes souffrent de difficultés respiratoires, d'inflammation oculaire et d'autres symptômes suggérant l'utilisation d'une attaque au chlore.

Alep est sous le contrôle du gouvernement syrien.

Les responsables rebelles ont démenti ces accusations et affirmé que leurs forces ne possédaient pas d'armes chimiques.

Les obus tombés sur Alep ont répandu une forte odeur et causé des problèmes respiratoires, a également déclaré l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), une ONG basée à Londres qui suit le conflit syrien au jour le jour.

L'agence de presse officielle syrienne Sana donne un bilan de 107 personnes blessées, dont des enfants. Elle indique que trois quartiers d'Alep ont été touchés à l'aide de projectiles contenant des gaz étouffants.

Il s'agit du nombre de victimes le plus lourd à Alep depuis que les forces gouvernementales et leurs alliés ont repris la ville aux rebelles il y a près de deux ans.

Le ministère russe de la Défense a annoncé dimanche que ses avions de guerre avaient bombardé des rebelles dans leur bastion d'Idlib, parce qu'il les considère comme responsables d'avoir dispersé du gaz toxique sur Alep.

La Turquie a au préalable été informée de ces bombardements, a indiqué le général Igor Konachenkov. Ankara soutient certains groupes rebelles et a contribué à la conclusion d'un cessez-le-feu à Idlib.

Selon l'OSDH, les frappes aériennes qui ont touché dimanche les territoire rebelles du nord-ouest de la Syrie sont les premières depuis que la Russie et la Turquie ont accepté de créer une zone tampon dans le secteur au mois de septembre.

Le ministre turc de la Défense, Hulusi Akar, et son homologue russe, ont convenu dimanche que "des provocations récentes" visaient à nuire à l'accord sur Idlib, a annoncé le ministère.

ATTAQUE PAS REVENDIQUÉE

"Il y a eu un échange de vues selon lequel (...) cela pourrait continuer et il faut être prêt pour cela", a déclaré le ministère dans une déclaration.

Personne n'a revendiqué l'attaque d'Alep jusqu'à présent.

"Les explosifs (les obus) contenaient des gaz toxiques qui ont provoqué la suffocation chez les civils", a déclaré le chef de la police de la ville, Issam al Chilli, aux médias officiels.

Sur les images diffusées par l'agence Sana, on voit des patients transportés sur des brancards. Le personnel médical les aide à porter un masque à oxygène.

"Nous ne pouvons pas connaître le type de gaz utilisé, mais il pourrait s'agir de chlore. Nous avons soigné des patients sur cette base en raison des symptômes", a déclaré à Reuters Zaher Batal, président du Syndicat des médecins d'Alep.

Selon lui, il s'agit de la première attaque au gaz contre des civils dans la ville depuis le début de la guerre en Syrie, il y a plus de sept ans.

Le ministère syrien des Affaires étrangères a appelé le Conseil de sécurité des Nations Unies à condamner et à punir cette attaque.

Abdel Salam Abdel Razak, un responsable du groupe rebelle Nour el Din al Zinki, a déclaré que les rebelles ne possédaient pas d'armes chimiques ni n'avaient la capacité de les produire.

Abou Omar, porte-parole du groupe Failak al Cham, a accusé Damas d'avoir monté une machination pour avoir un prétexte pour attaquer des villes rebelles.

L'OSDH signale par ailleurs la mort de sept enfants et de deux femmes samedi à Djardjanaz, village de la province d'Idlib qui se trouve dans la zone démilitarisée instaurée en vertu de l'accord russo-turc du 17 septembre.

L'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) a imputé à l'armée syrienne plusieurs bombardements au chlore et un recours au gaz sarin en avril 2017, mais a également accusé les djihadistes de l'Etat islamique d'avoir utilisé du gaz moutarde.

Mais elle n'a pas accusé d'autres groupes insurgés d'avoir utilisé des armes chimiques. (Avec Ahmed Tolba au Caire, Kinda Makieh à Damas et Andrew Osborn à Moscou; Jean-Philippe Lefief et Danielle Rouquié pour le service français, édité par Eric Faye)