Énième revirement stratégique d'une histoire mouvementée, la griffe vient de mettre fin à son accord de licence avec l'italien Aeffe pour confier la fabrication de ses lignes femme, homme et enfants à plusieurs partenaires français, dont elle n'a pas voulu dévoiler l'identité, et dont les premières collections seront livrées l'hiver prochain.

Cacharel entend aussi contrôler sa distribution - gérée jusqu'ici par Aeffe - et sa communication, deux points cruciaux dans la gestion de l'image d'une marque.

La collaboration avec l'italien Aeffe s'est révélée peu fructueuse, avec un positionnement de prix jugé beaucoup trop élevé et une stratégie de distribution jugée peu flatteuse pour la marque.

"Les ventes n'ont pas du tout marché (...) Il fallait tout remettre à plat", a expliqué à la presse mardi Jean Bousquet, fondateur et propriétaire à 100% de l'entreprise.

La griffe conserve le contrôle de la création, placé depuis juin 2011 sous la houlette d'un duo de stylistes chinois, Ling Lu et Dawei Sun, qui signent des collections souvent bien accueillies par la critique.

Pour la fabrication, elle passera commande à des industriels français dont les usines sont pour la plupart délocalisées en Europe du Sud ou de l'Est.

"Cela nous permettra d'accoler à nos produits l'étiquette 'Cacharel Paris', car 70% de la valeur ajoutée sera française", a précisé Jean Bousquet.

La marque souhaite renouer avec ce qui a fait son succès dans le passé : une mode créative, fraîche et accessible.

A partir des collections de l'hiver prochain, les produits devraient être de 30% à 40% moins cher qu'aujourd'hui, avec des chemises autour de 150 euros, des robes aux environs de 250-350 euros et des manteaux qui ne dépasseront pas 500 euros, a expliqué Jean Bousquet.

ACCESSIBILITÉ

"Le prêt-à-porter créatif aujourd'hui est devenu beaucoup trop cher. Il faut qu'il ait de la fraîcheur mais aussi qu'il soit accessible. Notre marque est attendue là-dessus", a-t-il dit.

La société, qui vient de nommer un nouveau directeur général, le quatrième en l'espace de deux ans, a aussi connu une valse de directeurs artistiques.

"Il y a beaucoup de choses à faire revivre dans cette très belle marque, dont les codes ADN restent intacts", a observé le nouveau directeur général Richard Alibert, ancien PDG de la marque de vêtements de luxe pour enfants Bonpoint, passé aussi chez Céline (groupe LVMH).

Les trois lignes homme, femme et enfants devraient aussi retrouver une identité visuelle forte grâce à la collaboration d'une même équipe artistique.

Pour se relancer, Cacharel entend d'abord reconquérir le marché français et souhaite notamment ouvrir un magasin amiral à Paris d'ici à 2014. Elle compte doubler ses points de vente dans le monde pour atteindre la barre des 500 en 2014.

La société, aux dires de son fondateur, devrait accuser une perte comprise entre 200.000 et 500.000 euros en 2012, du fait des investissements consentis au deuxième semestre.

En 2011, la société a engrangé des revenus de royalties de 9,0 millions d'euros (sur des ventes au détail de 450 millions d'euros) et dégagé un résultat positif de 1,5 million, dopé par plusieurs cessions, à ses licenciés turc et chilien.

Créée en 1958, Cacharel avait compté parmi les marques françaises emblématiques des années 1960 et 1970. Elle avait fait fureur avec ses chemisiers en crépon et ses robes en imprimé liberty immortalisées par la photographe Sarah Moon.

Déclinante dans les années 1980-1990, elle avait fermé tour à tour ses usines de production dans le midi de la France avant de fermer son dernier site de Nîmes (Gard) et de lancer un plan social en 2009, ne conservant qu'une trentaine de salariés sur 150 et passant un accord de licence avec Aeffe.

Seuls ses parfums (Amor Amor, Anais Anais), fabriqués sous licence par L'Oréal ont bien résisté et comptent pour près de 75% des revenus de la marque.

Une gamme de lunettes fabriquées sous licence par le groupe hong-kongais Mondottica est attendue pour le printemps 2013.

Edité par Jean-Michel Bélot

par Pascale Denis