par Missy Ryan

WASHINGTON, 9 août (Reuters) - Un avion de transport C-130 du gouvernement irakien a acheminé vendredi des munitions à Erbil, la capitale de la région autonome du Kurdistan irakien, et les Etats-Unis s'efforcent de faciliter de futures livraisons, a déclaré un responsable de l'administration Obama.

Cette coopération militaire entre le pouvoir central à Bagdad et les autorités du Gouvernement régional du Kurdistan irakien (GRK) est "sans précédent", souligne-t-on à Washington.

Elle résulte de la menace que constitue la progression des djihadistes de l'Etat islamique (ex-EIIL) tant pour Bagdad que pour les régions kurdes du nord de l'Irak.

"Les développements des tout derniers jours ont recentré la question, et nous assistons à une coopération sans précédent entre Bagdad et Erbil contre l'Etat islamique non seulement dans les discussions mais aussi par un soutien véritable", poursuit ce responsable américain sous couvert de l'anonymat.

La cargaison livrée vendredi à destination des peshmerga, les combattants kurdes, était essentiellement composée de munitions pour des armes de petit calibre. D'autres livraisons pourraient suivre pour répondre aux demandes du GRK qui réclame notamment des mortiers et des fusils d'assaut AK-47.

L'administration Obama travaille en coopération avec le gouvernement irakien pour que ces équipements militaires soient acheminés "aussi vite que possible", a ajouté ce responsable américain.

A Erbil, la population s'est précipitée chez les marchands d'armes pour se procurer des fusils. Alan, un marchand d'armes, dit en avoir vendu 45 pour la seule journée de jeudi. "Evidemment les gens ont peur. Est-ce qu'Erbil est menacée ? Oui, la ville est en danger", dit-il.

COMBAT VITAL

Les combattants de l'Etat islamique qui progressent dans le nord de l'Irak ont récupéré en juin, après la débandade de l'armée irakienne à Mossoul, des blindés, des mitrailleuses et des armes lourdes. Des moyens sans commune mesure avec ceux dont disposent les pershmerga - littéralement "ceux qui défient la mort".

Avant même la nouvelle avancée des djihadistes, le gouvernement régional du Kurdistan avait envoyé début juillet des émissaires à Washington pour réclamer une assistance et des équipements militaires, notamment des chars, des transports de troupe blindés, des pièces d'artillerie et des fusils de haute précision. (voir )

Mais les tensions entre Bagdad et Erbil, alimentées en partie par les velléités indépendantistes du président de la région autonome, Massoud Barzani, et la suspicion des Kurdes à l'égard du Premier ministre irakien, le chiite Nouri al Maliki, compliquaient le coopération.

Les nouveaux gains territoriaux enregistrés depuis le week-end dernier par les combattants de l'Etat islamique ont radicalement modifié la donne.

Dans les villes de Sinjar et Zoumar comme sur le barrage de Mossoul, les peshmerga n'ont pu enrayer leur progression. Et les djihadistes sont désormais à une demi-heure de route d'Erbil; leur drapeau noir flotte depuis jeudi sur un barrage de sécurité établi tout près des limites du Kurdistan irakien.

"L'Etat islamique mobilise toutes ses forces en Irak et en Syrie pour venir combattre les peshmerga. C'est un combat très grave. Il est vital", a prévenu vendredi Hoshiyar Zebari, haut responsable kurde et ministre des Affaires étrangères du gouvernement irakien.

Les premières frappes aériennes ciblées menées vendredi par l'aviation américaine ont été accueillies avec soulagement par les Kurdes.

D'après un haut responsable kurde, elles ont notamment frappé un convoi d'une dizaine de véhicules blindés de l'Etat islamique qui faisait route vers Erbil. (avec Isabel Coles à Erbil; Henri-Pierre André pour le service français)