(Actualisé avec réactions, contexte)

par Michael Holden et Kate Holton

LONDRES, 11 novembre (Reuters) - En poste depuis seulement deux mois, le directeur général de la BBC, George Entwistle, a démissionné samedi, après la diffusion d'une émission accusant à tort de pédophilie un ancien responsable politique conservateur.

George Entwistle tire aussi les conséquences de la controverse provoquée par les accusations d'agressions sexuelles portées contre Jimmy Savile, ancien animateur vedette de la télévision britannique décédé l'an dernier.

Le malaise à la BBC s'est encore aggravé après la diffusion dans l'émission Newsnight d'une enquête accusant à tort de pédophilie un responsable conservateur de l'ère Thatcher.

Le directeur général a annoncé aux journalistes, devant le siège de la BBC à Londres, qu'il avait présenté sa démission "à la lumière des critères journalistiques inacceptables de l'émission Newsnight diffusée le vendredi 2 novembre".

"En tant que directeur général de la BBC, je suis le responsable de l'ensemble de ses contenus, et j'ai par conséquent décidé que la chose honorable à faire pour moi était de démissionner", a-t-il ajouté.

Le mois dernier, George Entwistle s'était défendu devant une commission parlementaire d'avoir contribué à étouffer le scandale Savile.

Cette affaire, qui a mis à mal l'image de la BBC, l'une des institutions du royaume, a provoqué en octobre la mise à l'écart d'un rédacteur en chef qui avait empêché deux mois après la mort de Savile la diffusion d'un sujet sur l'animateur. George Entwistle était alors directeur des programmes.

Jimmy Savile a animé pendant de longues années sur la BBC l'émission musicale "Top of the Pops" et "Jim'll Fix it", un talk-show très populaire qui permettait à des téléspectateurs de réaliser leurs rêves.

Les policiers qui enquêtent sur les accusations visant Savile, mort à l'âge de 84 ans, ont déclaré que l'animateur aurait pu faire jusqu'à 300 victimes pendant près de six décennies.

Il est accusé d'avoir abusé sexuellement de mineures. Certaines jeunes filles, agressées parfois dans les locaux de la BBC, avaient à peine 12 ans, selon certains témoignages.

RESTAURER LA CRÉDIBILITÉ DE LA BBC

George Entwistle avait succédé en septembre à Mark Thomson, parti pour diriger le New York Times.

Il lui a fallu aussitôt gérer l'une des crises les plus graves jamais traversées par la BBC.

Condamné pour la lenteur de la réponse de la BBC dans le scandale Savile, il a été ensuite fustigé lorsque l'affaire Newsnight a éclaté.

Son audition devant une commission parlementaire a déclenché des railleries, un député estimant qu'il avait fait montre d'une "absence lamentable de connaissance" de ce qui se passait au sein de l'organisation de 22.000 salariés qu'il dirigeait.

En reconnaissant qu'il ignorait à l'avance le contenu de l'émission Newsnight du 2 novembre à l'origine de cette nouvelle affaire, George Entwistle a fini de se décrédibiliser.

"On aurait pu lui pardonner l'affaire Savile et il aurait pu survivre s'il avait démontré qu'il maîtrisait la situation, mais cela n'a pas été le cas", a commenté Steve Hewlett, un ancien responsable de la BBC aujourd'hui consultant pour les médias.

Dans un communiqué, la ministre de la Culture et des Médias, Maria Miller, estime qu'"il est vital que la crédibilité et la confiance du public dans cette institution importante soit restaurée".

"Il est désormais crucial que la BBC mette en oeuvre les systèmes qui ganrantiront des informations et des programmes d'actualité de tout premier ordre", ajoute-t-elle.

L'intérim a été confié à Tim Davie, actuel directeur de la musique et des radios de la BBC. (Guy Kerivel et Henri-Pierre André pour le service français)