* Installation de la nouvelle collectivité unique

* Gilles Simeoni élu président du Conseil exécutif

* "Nous sommes des interlocuteurs raisonnables et pondérés"

AJACCIO, 2 janvier (Reuters) - Le chef de file des autonomistes de Corse Gilles Simeoni, élu mardi président du Conseil exécutif de Corse, a plaidé lors de son discours d'investiture pour un dialogue apaisé avec le gouvernement.

Conforté par la large victoire de sa liste de coalition avec les indépendantistes aux élections du mois dernier (56,46%), l'ancien maire de Bastia dispose d'une majorité absolue pour diriger cette nouvelle collectivité unique, née de la fusion de l'instance territoriale et des deux départements.

"Que Paris l'entende et le comprenne : nous sommes des interlocuteurs raisonnables et pondérés", a déclaré Gilles Simeoni, reconduit dans des fonctions qu'il occupe depuis décembre 2015.

"La question corse n'est pas seulement économique et sociale, même si le développement économique et la justice sociale sont des priorités. Elle n'est pas non plus uniquement institutionnelle, même si les institutions sont les fers de lance de l'action publique. Elle est une question fondamentalement politique", a poursuivi Gilles Simeoni.

Le sujet, a-t-il encore dit, "touche à l'existence d'un peuple et à la reconnaissance juridique, politique et symbolique de cette donnée centrale".

Les élus du Conseil exécutif ont symboliquement prêté serment sur une Constitution corse datant du XVIIIe siècle.

Jean-Guy Talamoni, reconduit pour sa part à la présidence de l'Assemblée, s'est exprimé d'abord en langue corse, en évoquant le "tamantu chjassu petricosu", expression désignant les quarante années de revendication indépendantiste dans l'île.

"AMITIÉ"

Pour autant, le président de l'Assemblée a estimé que la page de la violence politique était définitivement tournée depuis que le FLNC (Front de libération national corse) a annoncé en 2014 sa démilitarisation.

"Dans les discussions à venir, nous voulons parler à la France de Victor Schoelcher, de Pierre Mendès-France et de Michel Rocard. Une France digne de respect et, pourquoi ne pas le dire, d'amitié", a-t-il déclaré.

"Mais l'amitié n'a rien à voir avec l'allégeance. L'amitié se construit dans un rapport d'égale dignité. En ce qui me concerne, je suis persuadé que les femmes et les hommes de bonne volonté peuvent s'entendre et s'accorder", a ajouté Jean-Guy Talamoni, qui avait qualifié en 2016 la France de "pays ami".

Jacqueline Gourault, chargée du dossier au sein du gouvernement, est attendue dans l'île vendredi. Le Premier ministre, Edouard Philippe, doit quant à lui rencontrer les deux grands élus corses, "probablement courant janvier", selon Gilles Simeoni.

Les revendications des nationalistes portent sur l'instauration d'un statut de résident pour l'accès à la propriété, d'un statut fiscal dérogatoire, sur la reconnaissance du peuple corse et l'officialisation de sa langue, ainsi que le rapprochement puis l'amnistie des prisonniers dits politiques.

Fin décembre, Emmanuel Macron s'est dit ouvert à d'"éventuelles évolutions", tout en précisant que celles-ci ne pourraient se faire que dans le respect de la Constitution.

Et "ce cadre républicain ne permet pas de donner satisfaction à certaines revendications, comme le statut de résident ou la coofficialité de la langue corse", a-t-il dit dans un entretien au quotidien espagnol El Mundo. (Paul Ortoli, édité par Simon Carraud)