par Timour Azhari et Ahmed Rasheed

NADJAF, Irak, 12 mai (Reuters) - L'imam chiite Moktada al Sadr prépare son retour dans l'arène politique irakienne, deux ans après avoir annoncé son retrait de la vie politique, ce qui avait provoqué des affrontements meurtriers, ont déclaré des sources.

Son retour, probablement prévu pour les élections législatives de 2025, pourrait représenter une menace pour ses rivaux, notamment les partis chiites et les milices proches de l'Iran, et ébranler la relative stabilité de l'Irak, estiment les observateurs.

Toutefois, nombreux sont ceux au sein de la majorité chiite d'Irak qui devraient accueillir favorablement un retour de Moktada al Sadr.

"Le Mouvement sadriste a aujourd'hui des plans plus solides que la dernière fois afin de remporter davantage de sièges pour former un gouvernement de majorité" a déclaré un ancien parlementaire sadriste, bien que la décision de se présenter n'ait pas été officiellement prise.

Le parti de Moktada al Sadr avait remporté les élections législatives de 2021, mais l'imam avait demandé à ses députés de démissionner avant d'annoncer son "retrait définitif" de la vie politique l'année suivante faute d'être parvenu à former un gouvernement excluant ses rivaux chiites. Des violences avaient alors éclaté à Bagdad, faisant des dizaines de morts.

Moktada al Sadr, figure dominante de la vie politique irakienne depuis l'invasion américaine, s'oppose à toute forme d'ingérence étrangère en Irak, que ce soit de la part des Etats-Unis ou de l'Iran.

POSSIBLE RETOUR

Depuis le mois de mars, Moktada al Sadr revient sous le feu des projecteurs.

Il a rencontré, le 18 mars, le grand ayatollah Ali Sistani, plus haute autorité chiite d'Irak qui n'intervient publiquement sur les questions politiques qu'en cas de crise.

Un dignitaire religieux proche du grand ayatollah Sistani a dit que Moktada al Sadr avait évoqué un possible retour à la vie politique et au Parlement. Le cabinet du grand ayatollah Ali Sistani n'a pas répondu à une demande de commentaire.

Quelques jours après cette rencontre, Moktada al Sadr a appelé les députés auxquels il avait demandé de démissionner de se rassembler et de renouer avec la base politique du mouvement.

Moktada al Sadr a ensuite rebaptisé son organisation "Mouvement national chiite", un coup porté à ses rivaux chiites qu'il juge antipatriotiques et redevables à l'Iran, et une tentative de mobiliser davantage sa base, selon un proche de l'imam.

Bien que certains analystes craignent qu'un retour de Moktada al Sadr sur la scène politique ne provoque des perturbations, d'autres disent qu'il pourrait revenir plus modeste.

Un haut responsable politique sadriste, a déclaré que le mouvement pourrait chercher à s'allier avec certaines factions chiites au pouvoir tout en isolant d'autres groupes.

"Il y a des groupes avec lesquels nous avons des relations de longue date et avec lesquels nous pourrions nous allier avant ou après les élections. Ce que nous n'acceptons pas, c'est de conclure des accords avec des milices corrompues", a-t-il dit.

A Sadr City, quartier chiite du nord-est de Bagdad, de nombreux partisans de Moktada al Sadr attendent son retour.

"Cette ville soutient Moktada al Sadr et je ne pense pas qu'il nous oublierait après tous les sacrifices que nous avons fait pour lui", a dit Taleb Mouhaoui. "Il devra faire bouger les choses quand il reviendra."

(version française Camille Raynaud)