par Raheem Salman et Ahmed Rasheed et Yara Bayoumy

BAGDAD, 24 septembre (Reuters) - Environ 200 militaires irakiens étaient assiégés mercredi par l'Etat islamique dans un camp militaire de la province d'Anbar, dans l'ouest de l'Irak, les djihadistes utilisant une tactique déjà éprouvée ce week-end face à une armée apparemment impuissante.

Les vivres et les armes commencent à manquer, a expliqué un soldat joint par téléphone. Le camp est situé à Albou Etha, à dix kilomètres au sud de la ville de Ramadi.

"Il y a des soldats derrière nous, mais ils ne peuvent arriver jusqu'à nous parce que toute la zone est infestée de bombes et de mines", raconte Hussein Thamir.

"Il y avait un groupe de l'armée devant nous que (l'Etat islamique) a complètement détruit il y a six jours. Si nous nous retirons, nous serons tués", dit-il.

En utilisant une tactique similaire, les combattants de l'EI ont pris dimanche une base militaire à Saklaouiya, à 50 km à l'ouest de Bagdad, faisant 400 à 600 morts ou prisonniers parmi les soldats, a indiqué un haut responsable irakien de la sécurité.

Ces pertes illustrent une fois de plus l'état très dégradé de l'armée irakienne, gangrenée par la corruption et qui s'est révélée incapable de faire face à l'avancée de l'Etat islamique.

"La situation à Ramadi et autour est très mauvaise. L'armée est sur la défensive; elle n'attaque pas. Chaque jour, l'Etat islamique mène une opération. Nous allons perdre Ramadi à moins que l'armée de l'air américaine ne mène des frappes aériennes", déclare un membre des services de renseignements irakiens dans la province d'Anbar.

Selon la police et des sources tribales, l'armée irakienne, appuyée par des forces spéciales et des combattants qui soutiennent le gouvernement, essaie de combattre les insurgés à Albou Etha.

COUP FATAL

"Nous lançons une dure bataille pour isoler les combattants de l'Etat islamique dans une zone déserte près de Ramadi et cette fois, nous sommes déterminés à leur porter un coup fatal", a déclaré le chef de la police d'Anbar, Ahmed Saddag.

Selon le soldat Thamir, 200 militaires environ sont pris au piège dans le camp. "Nous nous protégeons en nous cachant derrière des maisons", dit-il.

Il ajoute qu'il peut voir les combats jusqu'à un kilomètre et que l'armée essaie de dégager un chemin pour que les assiégés puissent s'échapper. "Ils n'arrivent pas à nous atteindre. Je les vois", dit-il.

Selon le chef de la police d'Anbar, Ahmed Saddag, 132 soldats ont été faits prisonniers à Saklaouiya, mais leur sort est incertain. Quand l'Etat islamique s'est emparé d'un détachement militaire au Camp Speicher en juin, il a abattu plusieurs centaines d'hommes.

Dans un communiqué publié sur un site djihadiste, l'Etat islamique dit avoir tué près de 300 personnes dans les assauts menés à Sidjir et Saklaouiya et fait le décompte des véhicules perdus par l'armée. L'EI évoque la perte de 41 Humvee.

L'authenticité de cette déclaration n'a pu être vérifiée.

Le gouvernement irakien a annoncé avoir mis aux arrêts deux commandants pour négligence dans le désastre de Saklaouiya.

Un ancien conseiller à la Sécurité nationale, Mouaffak al Roubaie, explique les difficultés de l'armée irakienne par des problèmes endémiques tels qu'une formation inadaptée des officiers, une discipline insuffisante, le moral très bas des hommes et un manque de coordination avec les volontaires des milices.

"Ce n'est pas quelque chose qui peut être réparé rapidement. (...) Ce sont des problèmes structurels", a-t-il déclaré à Reuters. (Avec Ned Parker à Baghdad et Omar Fahmy au Caire; Danielle Rouquié pour le service français, édité par Bertrand Boucey)