* L'opposition organisait une journée de manifestations

* Elle appelle à boycotter la présidentielle du 18 mars

* Navalny a brièvement participé au rassemblement à Moscou

* Il a ensuite été interpellé et libéré dans la soirée (Actualisé avec libération de Navalny, nombre d'arrestations)

par Maria Tsvetkova et Denis Pinchuk

MOSCOU, 28 janvier (Reuters) - L'opposant russe Alexeï Navalny a été interpellé par la police alors qu'il participait dimanche à Moscou à une manifestation interdite appelant au boycott de l'élection présidentielle du 18 mars, considérée par l'opposition comme étant jouée d'avance.

Alexeï Navalny a été déclaré inéligible par la commission électorale en décembre à la suite d'une condamnation lors d'un procès pour détournement de fonds qu'il a qualifié de politique.

Il estime que la présidentielle du 18 mars, que Vladimir Poutine est assuré de remporter, est une "parodie" d'élection.

Il est peu probable qu'Alexeï Navalny parvienne à peser sur le scrutin présidentiel. Mais sa capacité à utiliser les réseaux sociaux pour mobiliser les foules, notamment les jeunes manifestants dans les grandes villes, a suscité la colère du maître du Kremlin.

Le nombre de personnes qui ont participé dimanche aux manifestations dans toute la Russie - certains criaient : "Poutine, voleur!" est apparu inférieur à celui des précédents rassemblements organisé par Navalny, ont calculé les journalistes de Reuters.

Sur les images des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux, on aperçoit Navalny sur la principale artère de Moscou, la rue Tverskaïa, à quelques centaines de mètres du Kremlin, en train de rejoindre quelque centaines de partisans.

A peine a-t-il parcouru quelques mètres, qu'il est entouré par des policiers casqués qui s'emparent de lui et le plaquent au sol. Puis, ils le tirent par les pieds jusqu'à un fourgon, selon les images diffusées en vidéo.

L'opposant a été placé en garde à vue dans un commissariat de police du centre de Moscou avant d'être libéré sans qu'aucune charge ne soit retenue contre lui, mais il devra néanmoins se présenter devant la justice à une date ultérieure, a déclaré son avocate, Olga Mikhaïlova.

Il encourt 30 jours de prison en cas d'inculpation pour violation de la législation concernant les manifestations.

Navalny est apparu comme une menace pour le Kremlin le 12 juin dernier quand plusieurs milliers de ses partisans, défiant l'interdiction de la police, ont manifesté dans toute la Russie.

"VOTRE VIE EST EN JEU"

Dimanche, environ 1.500 personnes ont convergé vers la place du Manège, adjacente au Kremlin, mais elles ont été empêchées d'aller plus loin par des barrières de métal et un cordon de plusieurs dizaines de policiers en tenue anti-émeute.

Des centaines de personnes ont aussi manifesté à Saint-Pétersbourg, la deuxième ville de Russie, mais aussi à Ekaterinbourg (un millier de participants) dans l'Oural et dans d'autres grandes villes. On a manifesté jusqu'en Sibérie, mais aussi à Vladivostok, dans l'Extrême-Orient russe, où 200 participants se sont rassemblés.

A 18h30 de Moscou (15h30 GMT), la police avait interpellé 257 manifestants dans l'ensemble du pays, selon OVD-Info, organisation non gouvernementale qui comptabilise les arrestations.

Avant cette journée de manifestation, qui devrait concerner au total 118 villes, selon le décompte des opposants, le militant anti-corruption avait appelé les Russes à la mobilisation dans une vidéo diffusée sur internet.

"Votre vie est en jeu", a-t-il déclaré. "Combien d'années encore voulez-vous vivre avec ces voleurs, ces réactionnaires et ces brutes?"

Avant son interpellation, la police a effectué une perquisition dans ses bureaux de Moscou, disant rechercher une bombe. Elle a fermé un studio à partir duquel les partisans d'Alexeï Navalny diffusaient des journaux télévisés et arrêté six personnes, ont témoigné des opposants.

Les autorités russes avaient prévenu qu'elles ne toléreraient aucun rassemblement illégal et avaient interdit les manifestations dans la capitale et à Saint-Pétersbourg.

Alexeï Navalny accuse Vladimir Poutine, au pouvoir depuis 18 ans en tant que président ou Premier ministre, de chercher à étouffer toute forme d'opposition.

Vladimir Poutine, qui a 65 ans, a déjà passé plus de temps au pouvoir, en tant que président ou que Premier ministre, que Léonid Brejnev. Seul, le dictateur Joseph Staline est resté plus longtemps au pouvoir (plus de 30 ans comme secrétaire général du Comité central du Parti communiste).

Faute de suspense sur le nom du vainqueur, le principal enjeu de l'élection présidentielle sera le taux de participation. D'après les médias russes, le Kremlin souhaite qu'il soit d'au moins 70% pour donner à Vladimir Poutine une plus grande légitimité. Alexeï Navalny appelle à l'inverse les Russes à rester chez eux. (Katia Goloubkova, Gabrielle Tetrault-Farber, Polina Ivanova et Jack Stubbs à Moscou, Natalia Chourmina et Nastasia Teterevleva à Ekaterinbourg, et Mikhail Antonov à Saint-Petersbourg; Tangi Salaün et Eric Faye pour le service français)