* Le dépouillement se poursuit dans trois des 67 comtés

* Le résultat n'aura pas d'incidence nationale mais la situation rappelle la crise de 2000

* La Floride est le symbole des archaïsmes du système électoral US

par Tom Brown

MIAMI, 9 novembre (Reuters) - Le décompte des voix s'est poursuivi jeudi en Floride, le seul Etat où l'on ignore encore qui du président démocrate ou de Mitt Romney l'a emporté mardi, mais le président des instances locales du Parti démocrate a adressé ses félicitations à Barack Obama, qu'il considère comme le vainqueur du scrutin.

"Au nom des démocrates de Floride, j'adresse mes félicitations au président Barack Obama pour sa réélection et pour avoir remporté les 29 voix de la Floride (au collège électoral)", a déclaré Rod Smith dans un communiqué.

Au dernier pointage, Obama devançait son rival républicain en Floride de 58.055 voix, soit 49,92% contre 49,22%, mais les autorités locales n'ont pas encore proclamé les résultats de l'élection présidentielle dans le "Sunshine State".

Les représentants locaux du Parti républicain n'ont pas davantage reconnu officiellement la défaite de leur candidat. Mais leur porte-parole, Brian Burgess, a admis dans un communiqué que les partisans de Mitt Romney n'étaient "évidemment pas heureux du résultat" en Floride.

Si la victoire d'Obama en Floride est confirmée, le président démocrate disposera de 332 grands électeurs au collège électoral, où il est déjà assuré d'une confortable majorité de 303 grands électeurs, contre 206 pour Mitt Romney.

Il aura aussi réalisé une performance quasi parfaite dans les "Swing States", ces Etats pivots où l'électorat bascule d'un camp à l'autre au gré des scrutins: seule la Caroline du Nord a majoritairement voté pour le candidat républicain tandis que le président sortant l'emportait dans l'Ohio, la Virginie, l'Iowa, le Nevada, le Wisconsin ou encore le Colorado et le New Hampshire.

LE SOUVENIR DE LA BATAILLE BUSH-GORE EN 2000

Contrairement à la présidentielle de l'an 2000, où la Floride avait déterminé le vainqueur de l'élection qui mettait aux prises George W. Bush et Al Gore, l'issue de la bataille locale n'aura eu cette fois aucune incidence, sinon de mettre de nouveau en évidence les lacunes et les défaillances du système de vote en Floride.

"Il est écoeurant que la Floride, deux jours après l'élection, ne soit toujours pas en mesure d'annoncer les résultats de notre élection présidentielle", a fustigé du reste Rod Smith.

Le patron des démocrates locaux a réclamé que le gouverneur républicain de la Floride, Rick Scott, et les députés locaux, majoritairement républicains, s'attellent à une réforme du système de vote "pour faire en sorte que nous corrigions cet affront à notre système de participation démocratique".

Jeudi en début de soirée, les opérations de dépouillement se poursuivaient dans trois comtés, dont deux, Broward et Palm Beach, votent généralement démocrate.

La Floride n'est pas le seul Etat où des difficultés soient apparues le jour du vote. En Pennsylvanie et dans l'Ohio par exemple, les nouvelles législations sur l'identification des électeurs ou des questions sur l'inscription sur les listes ont provoqué de la confusion. Certains électeurs ont dû patienter le temps de procéder à des vérifications, d'autres se sont vus demander de remplir des bulletins de vote "provisoires".

Dans son discours de victoire, prononcé dans la nuit de mardi à mercredi à Chicago, Barack Obama a du reste évoqué ces problèmes et la nécessité qu'il y a d'y remédier.

Mais la Floride, où des électeurs attendaient toujours de pouvoir voter six heures après la fermeture théorique des bureaux de vote, est en première ligne.

La lenteur une nouvelle fois établie des processus de vote et de dépouillement, source d'inspiration pour les humoristes américains, rappelle évidemment la crise post-électorale de 2000. Après cinq semaines de recours et de procédures, George Bush avait été proclamé vainqueur de la Floride avec 537 voix d'avance sur Al Gore. Sa victoire dans le Sunshine State lui avait permis d'obtenir de justesse la majorité des votes au sein du collège électoral.

LE VOTE ANTICIPÉ RÉDUIT ET DES BULLETINS À RALLONGE

Jeudi, nul responsable floridien ne se hasardait à dire quand le résultat officiel du vote pourrait être proclamé.

Le gouverneur Scott a refusé d'endosser la moindre responsabilité dans ce nouveau couac.

Mais de nombreux observateurs estiment qu'en confirmant la réduction de la période de vote anticipé - ramenée pour ce scrutin de 14 à huit jours par les députés locaux -, il a contribué aux longues files d'attente qui se sont formées mardi devant les bureaux de vote.

Le nombre de scrutins à enjeu local sur lesquels les électeurs étaient appelés à se prononcer, en plus de la présidentielle, est également en cause: les Floridiens devaient notamment trancher sur onze amendements à la constitution locale.

"Dans d'autres Etats, les élections sont aussi serrées, sans qu'il n'y ait ce genre de problèmes. Dans d'autres Etats, les bulletins de vote sont encore plus longs, sans qu'il n'y ait ce genre de problème", note Charles Stewart, professeur de science politique au Massachusetts Institute of Technology et co-directeur du Caltech/MIT Voting Technology Project, un programme de recherche sur le vote électronique, qui pointe une autre particularité du vote en Floride.

Les superviseurs des élections en place dans les comtés, explique-t-il, ne sont pas des professionnels recrutés pour leurs compétences, mais sont choisis par des élections partisanes. "Lorsque les mêmes erreurs et les mêmes problèmes surviennent à chaque fois, c'est que les fondamentaux de la gestion des foules ne sont pas respectés", dit-il.

RENVOI

Pour retrouver le TABLEAU des résultats de l'élection présidentielle, double-cliquer sur (avec David Adams à Miami et Deborah Charles à Washington; Henri-Pierre André pour le service français)