* Plus de deux millions de Catalans auraient voté

* Les résultats de la consultation attendus lundi

* Le ministre de la Justice a parlé d'un acte "stérile"

* Il a promis de nouvelles mesures contre le vote

par Inmaculada Sanz

BARCELONE, 9 novembre (Reuters) - Plus de deux millions de Catalans auraient voté dimanche lors d'une consultation symbolique sur l'indépendance de leur région par rapport à l'Espagne malgré l'opposition du gouvernement central de Madrid.

Cette "consultation citoyenne" se substituait à un référendum plus officiel, bloqué par la Cour constitutionnelle, que voulaient organiser les dirigeants de la région à l'origine.

En raison de sa valeur purement consultative, la gestion de la "consultation" de dimanche a reposé sur les militants des organisations favorables à l'indépendance.

Compte tenu des difficultés d'organisation du scrutin, le taux de participation sera sans doute considéré comme plus importants que les résultats même du scrutin, attendus lundi.

Selon le chef du gouvernement régional Artur Mas, plus de deux millions de personnes se seraient déplacées pour mettre leur bulletin dans l'urne, sur 5,4 millions d'électeurs potentiels.

"Nous avons gagné le droit d'organiser un référendum", a déclaré Artur Mas, devant ses partisans qui l'acclamaient. Il a qualifié le vote de succès historique, ouvrant la voie à un référendum en bonne et due forme.

"Une fois encore, la Catalogne a montré qu'elle voulait se gouverner elle-même", a ajouté le président de la Généralité de Catalogne.

Le ministre espagnol de la Justice, Rafael Catala, a accusé Artur Mas d'avoir organisé "un acte de pure propagande politique sans validité démocratique. Un événement stérile et inutile." Il a indiqué que le gouvernement allait prendre de nouvelles mesures contre le vote.

Ce scrutin intervient après deux années de montée des tensions entre le gouvernement central et la généralité de Catalogne. Le gouvernement de Madrid fait valoir que la Catalogne, qui représente environ 16% de la population espagnole, ne peut, pour des raisons constitutionnelles, décider seule d'une question qui concerne l'Espagne dans son ensemble.

Les sondages ont montré que 80% des Catalans souhaitaient un vote sur la question du statut de la Catalogne et que 50% étaient favorables à l'indépendance pure et simple.

ÉTAPE DÉCISIVE

"S'ils ne nous comprennent pas, ils devraient au moins nous respecter et accepter que chacun aille de son côté", a déclaré Angels Costa, un commerçant de 52 ans.

"Nous aurions aimé faire partie d'un Etat fédéral mais ce n'est plus possible. Ils nous ont trop méprisés", a-t-il ajouté au sujet des autorités de Madrid.

Les organisations favorables à l'indépendance ont fait campagne pour que le taux de participation soit très important dans cette riche région de 7,5 millions d'habitants, qui représente 20% du PIB espagnol. Plus de 40.000 volontaires sont venus aider à tenir et surveiller les bureaux de vote informels.

Les sécessionnistes comptaient sur une forte participation pour inciter Madrid à négocier une plus grande autonomie pour la Catalogne dans les domaines politique et budgétaire.

Certains espèrent même convaincre Madrid d'accepter à terme un référendum officiel sur l'indépendance.

"Interdire la démocratie est toujours une grosse erreur", a déclaré à Reuters Oriol Junqueras, chef de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), rencontré à un bureau de vote.

"Nous espérons que ceci deviendra (...) l'étape décisive pour obtenir une majorité pro-indépendance au Parlement catalan qui nous permettra de proclamer l'indépendance de la Catalogne", a-t-il déclaré.

Les responsables des deux principaux partis catalans, Convergence et Union (CiU, droite), présidé par Artur Mas, et l'ERC, avaient suggéré qu'une participation de plus d'un million et demi de votants créerait un élan en faveur de leur cause.

Le mouvement pour l'indépendance existe depuis longtemps dans cette région dotée d'une culture et d'une langue propres mais il s'est renforcé ces dernières années en raison des difficultés économiques.

Face à la crise, de nombreux Catalans jugent en effet qu'ils donnent trop à l'Etat et ne reçoivent pas assez.

Début septembre, encouragés par le référendum sur l'indépendance de l'Ecosse, même si le "non" l'a finalement emporté, plusieurs centaines de milliers de Catalans étaient descendus dans les rues de Barcelone, formant un immense "V" pour demander le droit de vote.

Ceux qui ne sont pas favorables à un divorce avec le reste de l'Espagne ne devraient pas s'être mobilisés en force pour aller voter. Cela a été le cas de Roberto Ruiz, 30 ans, qui était en train de courir dimanche.

"Non, je ne vote pas. Cela ne changera rien et je suis contre (l'indépendance) de toutes façons", a-t-il dit. Je suis Catalan, mais je suis aussi espagnol." (Guy Kerivel et Danielle Rouquié pour le service français)