Ces établissements, qui recouraient peu à la Banque centrale européenne (BCE) pour se refinancer avant 2008, en sont devenus dépendants lorsque la crise s'est déchaînée et que l'accès au marché s'est révélé compliqué sinon impossible.

Cette dépendance reste encore visible aujourd'hui. A la fin du troisième trimestre, 435 milliards d'euros d'obligations sécurisées et 369,5 milliards d'euros d'ABS étaient engagés comme garanties (collatéraux) pour bénéficier de financements de la BCE, suivant des données de cette dernière.

Toutefois, la réouverture de la plupart des marchés et le sentiment que le pire est passé les autorisent à voir ailleurs et certaines revendent des collatéraux auparavant mobilisés à la BCE ou rompent avec des programmes de financement d'urgence.

"Il n'y a pas que le régulateur qui veut une diversification des sources de financement, il y a aussi le marché, les agences de notation, les banques elles-mêmes; toutes les banques espagnoles sont disposées à chercher d'autres possibilités de financement", dit Carlos Pertejo, responsable des activités de banque d'investissement pour la péninsule ibérique chez Goldman Sachs.

CaixaBank a annoncé lundi que, sur un montant de 18,4 milliards d'euros d'obligations adossées à des actifs hypothécaires, elle en rachèterait 9,7 milliards. La majorité de ces titres, émis au deuxième trimestre 2012, ont été conservés par la banque dans ses livres, "afin de générer un supplément de collatéraux pour des refinancements de la BCE au cas où les conditions du marché se seraient encore dégradées".

Même si la banque n'a pas complètement renoncé à émettre des titres pour son propre compte et aux fins de collatéraux, l'ampleur du rachat et l'amortissement anticipé montrent qu'elle a trouvé un meilleur usage aux collatéraux attachés à ces titres.

"CaixaBank a très bien mené sa barque en restaurant une courbe senior, avec trois opérations senior non garanties suivies d'un Tier 2 cette année", observe Pertejo. "Elle n'a pas besoin de l'optionalité d'un collatéral BCE et le rembourser constitue un signal fort pour le marché".

La banque espagnole remboursera 12,6 milliards d'euros à la BCE et rachètera 977 millions d'euros d'actions préférentielles détenues par le Frob, le fonds de restructuration bancaire, selon des analystes crédit d'ING.

Les banques italiennes de même recommencent à revendre sur le marché secondaire des titrisations qui avaient été pareillement conservées, des transactions qui avaient fait leur apparition voici plus d'un an mais qui avaient subi un coup d'arrêt à la suite des retombées des élections de février.

"PAS SANS RISQUE"

Selon JP Morgan Research, l'année 2008 a vu l'émission de 832 milliards d'euros de titrisations européennes émises pour servir de collatéral. Se focalisant sur la périphérie de la zone euro, la banque dénombre 165 milliards d'euros de transactions de ce type émanant de l'Espagne, du Portugal, de l'Irlande et de l'Italie en 2009, puis 95 milliards en 2010, 112 milliards en 2011 et 81 milliards en 2012.

Ce diminution des émissions ayant pour seule fin de servir de collatéral intervient avant que la BCE ne procède à un examen de la qualité des actifs bancaires, préalable à sa future supervision du secteur. L'institut d'émission vérifiera l'état des créances douteuses, de la liquidité, de l'endettement et du financement et les banques sont fortement incitées à mettre de l'ordre dans leurs affaires.

Déboucler des programmes de collatéraux BCE est une chose mais les banques revendent aussi de précédentes titrisations bloquées dans leurs comptes pour autant qu'elles aient été structurées de manière à ce que les marchés s'en accommodent.

Ainsi, non seulement les banques réduisent leur dépendance à la liquidité banque centrale mais encore elles diminuent leurs actifs pondérés des risques, une bonne manière de toiletter le bilan avant que la BCE ne vienne l'inspecter.

Ce marché de revente de titrisations bloquées devient intéressant mais il n'est pas sans risque.

"La bonne stratégie est d'acheter un bloc et de s'en débarrasser rapidement. Tout le monde a bien conscience de l'importance de l'encours de papier périphérique et personne ne peut mesurer l'intensité de la demande des investisseurs à l'heure actuelle", déclare un trader, craignant un effet boule de neige de ce marché où tout le monde se mettrait à revendre au même moment.

De surcroît, les prix qui ressortent de ce genre de transactions sont beaucoup moins intéressants que les refinancements servis par la BCE, laquelle continue de fournir de la liquidité illimitée au taux de 0,25% - son taux refi - tout en poursuivant également des opérations de refinancement à 91 jours.

Wilfrid Exbrayat pour le service français, édité par Marc Joanny

par Owen Sanderson