par Nidal al-Mughrabi, Bassam Masoud et Dan Williams

LE CAIRE/GAZA/JERUSALEM, 21 décembre (Reuters) - Israël a soumis jeudi la bande de Gaza à d'intenses bombardements tandis que les combats au sol faisaient rage avec les activistes du Hamas, qui ont prouvé leur capacité à frapper encore le territoire israélien avec des tirs de roquettes en direction de Tel Aviv malgré 10 semaines de guerre dans l'enclave palestinienne.

Le conflit semble gagner chaque jour en intensité alors même que les pourparlers indirects entre les deux camps en vue d'une nouvelle trêve paraissent n'avoir jamais été aussi approfondis.

Les bombardements israéliens ont été particulièrement intenses dans le nord de la bande de Gaza où, dès l'aube, on pouvait voir depuis le territoire israélien les éclairs orange des explosions et des colonnes de fumée noire s'élever dans le ciel, au milieu du vrombissement des avions et du crépitement des fusillades, masqué toutes les quelques secondes par des détonations.

A Tel Aviv, les sirènes d'alerte ont résonné et des roquettes interceptées par la défense antiaérienne israélienne ont explosé en vol. Les services ambulanciers israéliens ont fait état de plusieurs impacts au sol mais pas de victimes dans l'immédiat.

Le Hamas, via sa branche armée, a déclaré avoir tiré cette salve en représailles au meurtre de civils par Israël. Alors que le chef du mouvement islamiste palestinien, Ismaïl Haniyeh, se trouve au Caire pour discuter d'une éventuelle trêve, ces tirs semblent aussi destinés à montrer à ses interlocuteurs que le Hamas conserve des capacités d'action malgré 10 semaines de bombardements et d'offensive terrestre ayant réduit la majeure partie de Gaza à l'état de ruines.

Des habitants de Djabalia, dans le nord de la bande de Gaza, ont déclaré que le secteur était complètement coupé du reste du territoire, avec des tireurs embusqués israéliens ouvrant le feu sur toute personne tentant de fuir.

"Cela a été l'une des pires nuits en termes de bombardements de la part de l'occupant. On pouvait aussi entendre les intenses combats malgré ça", a dit un habitant de Djabalia refusant d'être identifié par peur de représailles.

VOTE ATTENDU À L'ONU

Alors que les communications sont coupées pour une deuxième journée consécutive à Gaza, cet habitant a pu parler à Reuters grâce à une carte SIM lui ayant permis de se connecter au réseau israélien. Les Gazaouis déclarent que ces coupures des réseaux de communication annoncent généralement des assauts israéliens.

Le Croissant-Rouge palestinien a déclaré pour sa part ne plus être en mesure de venir au secours de nombreuses victimes à l'intérieur de Djabalia.

L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a déclaré jeudi que le dernier hôpital en activité dans le nord de la bande de Gaza avait de fait cesser de fonctionner au cours des deux derniers jours.

Parallèlement à ces combats et malgré la fermeté affichée en public par les deux camps, une intense activité diplomatique est déployée pour tenter de parvenir à une nouvelle trêve susceptible de permettre l'acheminement d'une aide plus importante à Gaza et des libérations d'otages supplémentaires.

La précédente trêve d'une semaine, qui a pris fin le 1er décembre, a permis de libérer une centaine des 240 otages enlevés par le Hamas lors de son attaque du 7 octobre contre des villages et des kibboutz du sud d'Israël, qui a fait environ 1.200 morts.

Ismaïl Haniyeh se trouve en Egypte pour une deuxième journée de pourparlers. Le chef du Hamas n'intervient généralement en personne que dans les phases cruciales de négociations. Le Djihad islamique, autre mouvement palestinien allié au Hamas, a déclaré que son chef était aussi en route pour l'Egypte.

"Il y a des discussions et des négociations très sérieuses et nous espérons qu'elles aboutiront à quelque chose", a déclaré mercredi John Kirby, porte-parole de la Maison blanche, à bord de l'avion présidentiel américain. Joe Biden a pour sa part déclaré : "Nous faisons pression."

Les membres du Conseil de sécurité des Nations unies doivent voter ce jeudi sur une résolution destinée à renforcer l'aide à Gaza. Ce vote a été retardé à la demande des Etats-Unis, qui ont déjà bloqué à eux seuls, par leur veto, des résolutions prônant un cessez-le-feu humanitaire.

Le texte soumis au vote jeudi renforcerait la supervision de l'Onu sur l'acheminement de l'aide, une évolution susceptible d'affaiblir le contrôle d'Israël sur les livraisons à Gaza.

(Reportage Nidal al-Mughrabi au Caire, Bassam Masoud à Gaza, Dan Williams à Jérusalem et Steve Holland à bord d'Air Force One, rédigé par Peter Graff, version française Bertrand Boucey, édité par Blandine Hénault)