par Juliette Rouillon

Des bases de comparaison 2009 favorables, la poursuite de l'amélioration des marges bénéficiaires à la suite des réductions drastiques de coûts réalisées l'an dernier et surtout la hausse du dollar vis-à-vis de l'euro devraient réserver à nouveau quelques bonnes surprises au marché.

Mais ces bonnes nouvelles devraient avoir un impact limité sur les cours de Bourse, dans des marchés essentiellement focalisés sur les tests de résistance des banques et les risques liés à la dette souveraine des Etats de la zone euro.

Après d'excellentes performances au quatrième trimestre 2009 et au premier trimestre 2010, le rythme de croissance des ventes et des profits des entreprises européennes devrait ralentir, soulignent les stratégistes.

"Les résultats trimestriels devraient être bons. Nous pensons qu'une majorité de sociétés pourra faire aussi bien, sinon mieux, que les attentes du marché, mais pas de façon aussi spectaculaire qu'aux trimestres précédents", résume Lars Kreckel, stratégiste européen chez Exane BNP Paribas.

Après une révision en hausse de plus de 9% du consensus de résultats 2010 des valeurs du MSCI Europe depuis le début de l'année, la dynamique de relèvement des estimations des analystes devrait s'essouffler aussi, ajoute-t-il.

Selon Claudia Panseri de SG CIB, environ un tiers des résultats publiés cet été en Europe devrait entraîner des révisions en hausse, contre 55% des publications du premier trimestre.

D'autres sont moins optimistes et pensent que le mouvement de révision à la hausse est derrière nous.

"Il ne devrait pas y avoir de nouvelle vague de révisions haussières pour l'année 2010 à la suite de ces résultats", dit Tristan Abet, stratégiste chez CA Cheuvreux, qui n'attend pas pour autant que les analystes abaissent leurs estimations 2010.

PLUS GROS RISQUE SUR 2011

Selon le consensus Thomson Reuters I/B/E/S, les analystes prévoient une croissance moyenne de 28% des bénéfices par action 2010 des sociétés du CAC 40.

Pour 2011, la plupart des stratégistes jugent le consensus - +19% selon Thomson Reuters I/B/E/S toujours pour le CAC 40 - nettement trop élevé.

"C'est sur l'année 2011 que réside le plus gros risque en matière de résultats", souligne Lars Kreckel.

SG CIB a déjà abaissé sa prévision de hausse des BPA en Europe à 10%, alors que le consensus se situe encore autour de +20%, afin de prendre en compte le ralentissement de la croissance et l'impact des plans d'austérité, qui ne sera pas entièrement compensé par l'effet favorable de la hausse du dollar face à l'euro, note Claudia Panseri.

Les stratégistes s'attendent à une réaction positive des marchés qui, d'après eux, sont excessivement pessimistes sur la croissance, mais elle devrait être limitée et de courte durée.

"Les marchés doivent trouver un prétexte pour se stabiliser, pour se calmer. Les profits, principal déterminant des marchés, vont être bons et pourraient servir de force de rappel vers le haut. La réalité économique n'est pas aussi détériorée que ce qu'en pensent les marchés", estime Tristan Abet.

"Le marché devrait très bien réagir. On passe d'un focus macroéconomique à un focus microéconomique", selon Claudia Panseri. "Mais je suis plus prudente sur l'ensemble de l'année."

Elle estime que le CAC pourrait toucher un pic de 3.700 points au mois de juillet, puis retomber vers le 3.300 points pour la fin du troisième trimestre et les 3.500 points pour la fin de l'année.

Plus pessimiste, Vincent Juvyns, stratégiste d'ING IM, se limite à espérer que ces résultats aient une influence positive.

"C'est quelque chose que l'on dit depuis le début de l'année: les fondamentaux sont bons et le sentiment est négatif. Je pense que ce sentiment (négatif) restera dominant", commente-t-il.

Par secteurs, les meilleures surprises devraient venir des valeurs cycliques et des "valeurs dollar", notamment dans le luxe, l'aéronautique et l'industrie des semi-conducteurs.

L'impact de la hausse du dollar devrait néanmoins rester modeste, sachant que la devise américaine n'a progressé en moyenne que de 7% par rapport à l'euro entre le deuxième trimestre 2009 et le deuxième trimestre 2010, souligne Exane.

De plus, les valeurs cycliques, comme les "valeurs dollars", ont déjà largement surperformé le marché en perspective de ces bons résultats et devraient réagir davantage aux perspectives.

Or, dans un contexte de visibilité historiquement faible, les dirigeants d'entreprises devraient rester très prudents.

Juliette Rouillon, avec Florent Le Quintrec, édité par Jean-Michel Bélot