Lausanne (awp/ats) - Au fil de quatre arrêts publiés mardi, le Tribunal fédéral confirme l'existence d'entraves à la concurrence sur le marché romand du livre en français. Un distributeur est lourdement sanctionné et un deuxième est renvoyé devant le Tribunal administratif fédéral. Enfin, deux autres sont acquittés.

Après une enquête préalable sur le marché du livre en français, la Commission de la concurrence (Comco) a ouvert en 2008 une enquête afin de déterminer si les diffuseurs-distributeurs occupaient une position dominante abusive. Cette dernière pouvait expliquer les prix élevés constatés en Suisse.

En 2012, la commission a conclu que dix sociétés avaient participé à des accords de distribution géographique, de fixation des prix de revente et d'attribution des zones de distribution. De lourdes sanctions ont été prononcées, de même que l'interdiction de telles ententes. Enfin, les distributeurs devaient supporter solidairement les frais de la procédure, soit plus de 760'000 francs suisses.

Participation à des accords illicites

La 2e Cour de droit public admet très partiellement le recours de la société Interforum Suisse et réduit à 76'000 francs suisses les frais de procédure mis à sa charge. Pour le reste, elle confirme la participation à des accords illicites en matière de concurrence déloyale. L'amende de 3,8 millions de francs suisses infligée par la Comco est confirmée. De même que l'interdiction d'entraver par de tels accords les importations parallèles de livres par des détaillants en Suisse.

Le recours de Diffusion Transat est admis plus largement. Les juges de Mon Repos estiment qu'il n'est pas établi que la société ait conclu des accords visant à empêcher des diffuseurs à l'étranger de vendre leurs livres à destination de la Suisse. La cause est renvoyée devant le Tribunal administratif fédéral afin qu'il réduise la sanction qui avait été fixée à 440'000 francs suisses. La part aux frais est ramenée à 76'000 francs suisses.

Deux acquittements

Enfin, le Tribunal fédéral admet les recours des Editions Glénat Suisse et de la société Servidis. Les amendes de 480'000 francs suisses et 760'000 francs suisses respectivement sont annulées, de même que la participation aux frais. La cour estime que les deux recourantes n'ont pas participé à des accords contrevenant à la loi sur les cartels (Lcart).

En juillet 2022, Mon Repos avait déjà admis un recours du diffuseur et distributeur Albert Le Grand, également condamné par la Comco. L'amende de 119'000 francs suisses, l'interdiction de conclure des accords illicites et la participation aux frais avaient été annulées.

Le conflit sur le prix du livre en Suisse romande pourrait connaître de nouveaux rebondissements. La Comco a annoncé mardi matin l'ouverture d'une enquête à l'encontre du groupe éditorial français Madrigall. Elle va examiner s'il "limite de façon illicite la possibilité pour les libraires suisses de se fournir en France à de meilleures conditions", a-t-elle indiqué.

Le directeur de Payot Pascal Vandenberghe avait porté plainte en septembre dernier auprès de la Comco contre Madrigall, dénonçant une surmajoration du prix des livres et une distorsion de la concurrence. Le groupe français comprend une quinzaine de maisons d'édition, dont Gallimard, Flammarion, Casterman et des marques éditoriales reconnues comme La Pléiade. (arrêts 2C_33, 44, 49, 52/2020 du 8 décembre 2020)

ats/lk