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par Jeffrey Heller

JERUSALEM, 10 septembre (Reuters) - Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a annoncé mardi son intention d'annexer la vallée du Jourdain, en Cisjordanie occupée, s'il remporte les élections législatives du 17 septembre.

"J'annonce aujourd'hui mon intention, après la mise en place d'un nouveau gouvernement, d'appliquer la souveraineté israélienne à la vallée du Jourdain et au nord de la mer Morte", a déclaré Benjamin Netanyahu dans une allocution télévisée.

Cette promesse sera mise en oeuvre "immédiatement après l'élection si je reçois de vous un mandat clair, citoyens d'Israël", a dit le chef du gouvernement.

Le président palestinien Mahmoud Abbas a prévenu dans un communiqué que "tous les accords (de paix intérimaires) signés avec Israël et les obligations qui en résultent seraient annulés" si Netanyahu devait appliquer cette mesure.

Benjamin Netanyahu se prépare à un scrutin serré et espère ainsi rallier des voix à l'extrême droite, qui prône depuis longtemps l'annexion - plus large - des colonies juives de Cisjordanie.

Son rival Yair Lapid, l'un des dirigeants du parti centriste Bleu et Blanc, au coude-à-coude dans les sondages avec le Likoud de Netanyahu, a dénoncé une "combine électorale pas très impressionnante parce que tellement transparente".

Environ 65.000 Palestiniens et 11.000 colons israéliens vivent dans la vallée du Jourdain et le nord de la mer Morte, selon le groupe israélien de défense des droits de l'homme B'Tselem. La principale ville de la région est Jéricho, entourée de 28 villages et petites localités bédouines.

Le chef du gouvernement, qui joue sa survie politique après avoir échoué à former un nouveau cabinet à l'issue des élections d'avril, a également réitéré sa promesse d'annexion de toutes les colonies juives de Cisjordanie.

Il a toutefois déclaré que cette étape supplémentaire serait plus longue à mettre en oeuvre et nécessiterait une "coordination maximale" avec les Etats-Unis.

"PREMIER FOSSOYEUR DU PROCESSUS DE PAIX"

"Par respect pour le président (Donald) Trump et grande foi en son amitié, j'attendrai" la publication du plan américain de relance du processus de paix israélo-palestinien, a dit Netanyahu.

Le plan américain, qui vise à relancer des pourparlers israélo-palestiniens au point mort depuis 2014, devrait être divulgué rapidement après les élections israéliennes.

Mais les Palestiniens jugent que ce plan conçu notamment par le gendre de Donald Trump Jared Kushner est voué à l'échec en raison du biais pro-israélien affiché par le président des Etats-Unis, qui a entre autres reconnu Jérusalem comme capitale de l'Etat hébreu et l'annexion par Israël du plateau du Golan.

Dans une interview publiée par le New York Times en juin dernier, l'ambassadeur des Etats-Unis en Israël David Friedman a affirmé que "dans certaines conditions", Israël avait le droit "de conserver la Cisjordanie en partie, mais probablement pas dans son ensemble".

Dans un communiqué publié peu après le discours de Netanyahu, le Premier ministre palestinien Mohammad Chtayyeh a qualifié son homologue israélien de "premier fossoyeur du processus de paix".

L'annexion serait un crime de guerre, a renchéri le négociateur palestinien Saeb Erekat.

Quant à Hanane Achraoui, haute responsable de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), elle a estimé sur Twitter que le chef de la droite israélienne cherchait à imposer un "grand Israël sur toute la Palestine historique et à appliquer un programme de nettoyage ethnique".

"Tout est possible. Agression dangereuse. Conflit perpétuel", a ajouté la responsable palestinienne.

Le secrétaire général de la Ligue arabe, Ahmed Aboul Gheit, a déclaré à l'issue d'une réunion au Caire des chefs de la diplomatie de l'organisation que cette décision, si elle venait à être appliquée, ruinerait toute chance de progrès dans les discussions de paix.

La vallée du Jourdain, que l'Etat hébreu occupe depuis la guerre des Six-Jours, en 1967, s'étend de la mer Morte au sud à la ville israélienne de Beit Shean au nord.

Avec 2.400 km2, elle représente près de 30% de la Cisjordanie. Son annexion mettrait à mal le projet d'Etat palestinien qui était jusqu'ici au coeur du processus de paix.

Le gouvernement israélien promettait déjà depuis plusieurs années d'y maintenir des contrôles militaires après l'éventuelle conclusion d'un accord de paix avec l'Autorité palestinienne. (Jean-Philippe Lefief et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)