WASHINGTON (Reuters) - L'économie américaine continue de progresser vers les critères de la Réserve fédérale pour une réduction des mesures d'aides d'urgence mise en place face à la pandémie de COVID-19, a déclaré vendredi le président de la Fed, Jerome Powell, qui s'est toutefois abstenu de fournir un calendrier sur une réduction des achats d'actifs au-delà de "cette année".

Jerome Powell a déclaré que la banque centrale resterait prudente dans toute décision éventuelle sur une hausse de taux alors qu'elle tente de ramener l'économie vers le plein emploi, affirmant vouloir éviter d'accorder une attention excessive à une inflation qu'il juge "transitoire" et de décourager potentiellement la croissance de l'emploi dans son processus, défendant ainsi la stratégie instaurée il y a un an.

En matière de réduction des achats d'actifs de la Fed, qui atteignent 120 milliards de dollars par mois, Jerome Powell, qui s'exprimait dans le cadre du symposium de Jackson Hole, a déclaré qu'il était en accord avec la majorité de ses collègues sur le fait qu'une réduction des achats d'actifs pourrait être appropriée "cette année".

Les semaines écoulées depuis le réunion du comité de politique monétaire en juillet ont permis "d'accomplir plus de progrès" vers le rétablissement du marché de l'emploi, avec près d'un million de postes créés, et ces progrès doivent se poursuivre, a-t-il dit.

Mais cette courte période a également coïncidé avec "la poursuite de la propagation du variant Delta du coronavirus", a-t-il rappelé.

Dans les jours qui ont précédé cette intervention, plusieurs présidents des antennes régionales de la Fed se sont exprimés en faveur d'un 'tapering'. Jerome Powell ne s'est quant à lui pas prononcé sur un calendrier ni sur les modalités d'une diminution des 120 milliards de dollars d'achats mensuels d'obligations et de prêts immobiliers titrisés (MBS).

"Nous évaluerons soigneusement les données disponibles et l'évolution des risques", a-t-il poursuivi, signalant que les discussions au sein de la Fed sur le calendrier du 'tapering' ne sont pas encore arrêtées et qu'elles doivent intégrer les risques sanitaire et économique.

Wall Street et les indices boursiers européens ont accéléré leurs progressions après ces déclarations, l'indice Standard & Poor's 500 de New York inscrivant un pic historique.

Le dollar est quant à lui tombé à son plus bas niveau depuis 10 jours face à un panier de devises de référence (-0,37%) et l'euro est repassé au-dessus de 1,18 dollar pour la première fois en deux semaines.

Sur le marché obligataire, le rendement des bons du Trésor américain à dix ans reculait de deux points de base à 1,3222% à 15h27 GMT.

"Jerome Powell comprend que le 'tapering' va arriver mais il ne va pas se produire plus tôt que plus tard", a déclaré Kim Forrest, directeur des investissements chez Bokeh Capital Partners.

PRÊT À S'ADAPTER

Des responsables de la Fed ont déclaré qu'ils s'attendaient à ce que la flambée épidémique ne fasse pas dérailler la reprise économique. Mais les inquiétudes liées au COVID-19 ont contraint la banque centrale à organiser en ligne sa réunion de Jackson Hole, traditionnelle rendez-vous d'été des banquiers centraux dans le Wyoming, pour la deuxième année d'affilée en raison de la pandémie.

Les membres de la Réserve fédérale prévoient "que la création d'emplois reste forte" et qu'ils vont progressivement en savoir "davantage sur les effets du variant Delta", a ajouté Jerome Powell. "Pour l'instant, je pense que la politique est bien positionnée; comme toujours, nous sommes prêts à l'ajuster."

Une large partie de son discours a consister à exposer les raisons pour lesquelles il estime que l'inflation élevée actuelle ne devrait pas durer, énumérant une liste de facteurs, allant des goulets d'étranglement dans la chaîne d'approvisionnement qui devraient s'atténuer à la mondialisation agissant comme un point d'ancrage sur les prix.

Bien que le rythme rapide actuel de la hausse des prix soit "une cause d'inquiétude", il serait également préjudiciable, a-t-il dit, que la Fed se précipite pour changer sa politique en particulier avec un relèvement prématuré de taux.

"Nous avons beaucoup de chemin à faire pour atteindre le plein emploi et le temps nous dira si nous avons atteint 2% d'inflation sur une base durable", a déclaré Jerome Powell.

"Si une banque centrale resserre sa politique en réponse à des facteurs qui s'avèrent être temporaires (...) le changement inopportun de politique ralentit inutilement le recrutement et les autres activités économiques et pousse l'inflation plus bas qu'espéré. Aujourd'hui, avec des faiblesses persistantes sur le marché de l'emploi atone et la poursuite de la pandémie, une telle erreur pourrait être particulièrement préjudiciable," a-t-il ajouté.

(Reportage Howard Schneider, version française Claude Chendjou et Laetitia Volga, édité par Bertrand Boucey)

par Howard Schneider et Ann Saphir