par Jean Décotte

LOURDES, Hautes-Pyrénées, 28 février (Reuters) - Devant la grotte de Lourdes Hautes-Pyrénées), au milieu du sanctuaire dédié à la Vierge, les accords d'une guitare retentissent, bientôt suivis par les voix d'une quinzaine de jeunes pèlerins.

Assis sur le muret qui longe le Gave de Pau, ces étudiants de l'université de Grenade (Andalousie) ont chamboulé le programme de leur séjour au Pays Basque pour pouvoir être présents dans la ville mariale ce jeudi, jour de la renonciation du pape Benoît XVI.

Comme eux, de nombreux religieux et fidèles de tous les pays sont venus se recueillir devant la grotte, où devait être célébrée une messe pour dire "au revoir" au souverain pontife.

Les jeunes Espagnols ont prévu de prier devant la grotte et d'effectuer un chemin de croix, afin, disent-il, d'"accompagner le pape" dans les dernières heures de son pontificat, qui s'achève à 20h00 (19h00 GMT, voir ).

"Je trouve sa décision courageuse", explique Paco, 20 ans, étudiant en architecture. "Cela montre que l'on peut reconnaître ses limites en mettant fin à ses fonctions. Cette décision devrait servir à tous ses successeurs. Je ressens de la joie devant ce geste de liberté et d'humilité."

Un couple de retraités, Dolores et Antonio, encadrent le groupe d'étudiants, et disent approuver la décision de Benoît XVI parce que, selon eux, l'Eglise a besoin de quelqu'un de "fort" à sa tête.

"C'est une époque compliquée", souligne Dolores, 65 ans, écharpe léopard et larges lunettes fumées.

"Il faut un pape jeune, avec un esprit ouvert, qui sache affronter les problèmes d'aujourd'hui: le manque de valeurs, la pédophilie, l'avortement, le mariage homosexuel..."

Autour de la grotte, sous l'oeil de la statue blanche et bleue de la Vierge Marie, certains pèlerins prient sur les bancs, d'autres allument des cierges.

"INTENSE EMOTION"

Mgr Nicolas Brouwet, évêque de Tarbes et Lourdes, a tenu à célébrer une messe à 19h00 (18h00 GMT), soit juste avant l'horaire retenu par Benoît XVI pour sa renonciation officielle.

"On a voulu être avec le pape dans ses dernières heures de pontificat", a-t-il expliqué à la presse après la prière du chapelet à la grotte. "De mémoire d'homme, personne n'a vécu ça. On voulait être avec lui et le soutenir dans sa décision."

Parmi les fidèles, Maria Laura Tan, une Malaisienne emmitouflée dans son anorak, explique être venue pour "unir ses prières" à celles du pape.

"J'aurais pu aussi le regarder à la télévision, sur internet, sur Youtube", dit-elle. "Mais ici, je peux le sentir."

Cette infirmière de 50 ans était déjà présente à Lourdes en 2008 lors de la visite de Benoît XVI et parle d'un "bon pasteur".

Beaucoup de catholiques se souviendront du pape Joseph Ratzinger comme d'un grand théologien, à l'instar de Sothynayaghi, une religieuse de 49 ans venue du Sri Lanka et qui appréciait les lettres et les textes du souverain pontife.

"Je suis triste, mais en même temps il a eu le sentiment qu'il ne pouvait plus y arriver donc il a laissé sa charge à quelqu'un d'autre pour reconstruire", souligne cette femme originaire de Jaffna, dans le nord du pays.

La décision de Benoît XVI de renoncer à sa charge semble faire peu débat, même si Cédric, un Vendéen de 41 ans, dit la regretter.

"Pour moi, il a été sacré pape et il aurait dû aller jusqu'au bout pour porter l'Eglise, comme Jean-Paul II. On accepte sa décision, on ne peut que l'accepter", souligne ce musicien. (Edité par Yves Clarisse)