par Véronique Tison

Le déficit commercial a atteint 5,3 milliards d'euros, son niveau le plus élevé depuis un an, pour totaliser 38,9 milliards depuis le début de l'année, selon les Douanes.

Les exportations, en progression de 2,1%, se sont plutôt bien tenues à l'exception de la branche aéronautique, mais leur hausse a été plus que contrebalancée par un bond de 4,6% des importations.

Le détail des statistiques montre que les déficits bilatéraux avec la Chine et l'Amérique se sont accrus, alors que l'euro a atteint ce mois-là son plus haut niveau de 2009 avec un pic à plus de 1,51 dollar le 26 novembre.

La monnaie unique a depuis enrayé son envolée de l'automne pour revenir aux alentours de 1,43 dollar, ce qui n'empêche pas les autorités européennes et françaises de continuer de dénoncer son niveau élevé.

Avant Noël déjà, la Commission européenne s'inquiétait de la surévaluation de la monnaie unique et le gouvernement français a fait des déséquilibres monétaires l'un des thèmes de sa rentrée de janvier.

Le président Nicolas Sarkozy a qualifié lundi de "problème considérable" la faiblesse du dollar et a renouvelé mardi son appel à un système international "multimonétaire". La ministre de l'Economie, Christine Lagarde, et le Premier ministre François Fillon lui ont emboîté le pas en demandant que la question soit traitée dans le cadre du G20.

62% DES EXPORTATIONS VERS L'EUROPE

Le yuan chinois étant indexé sur le dollar par la volonté des autorités chinoises, l'euro et le yen se retrouvent seuls, parmi les grandes monnaies, à supporter les inconvénients du dollar faible. Les exportateurs européens s'en trouvent pénalisés avec des produits plus chers sur les marchés mondiaux.

"C'est sûr que l'euro fort n'arrange pas les choses mais ce n'est pas la cause principale des difficultés du commerce extérieur français", observe Marc Touati, économiste chez Global Equities.

De fait, l'Allemagne, première puissance de la zone euro et championne européenne des exportations, a encore vu son excédent commercial progresser à 17,2 milliards d'euros en novembre, au plus haut depuis 17 mois.

Depuis le 1er janvier, le surplus allemand atteint 122,9 milliards d'euros quand les échanges extérieurs de la France ont accumulé un déficit de 38,9 milliards.

"Le commerce extérieur français souffre d'une mauvaise spécialisation sectorielle et géographique", explique Marc Touati.

"On est trop tourné vers l'Europe qui est la lanterne rouge de la croissance mondiale et pas assez vers les biens d'équipement, les biens 'high tech' qui apportent le plus de valeur ajoutée. Ils représentent 50% des exportations allemandes mais seulement 22% des françaises, c'est un grand écart."

Selon les données des douanes, la France est le quatrième exportateur mondial mais 62% de ses ventes sont à destination de l'Union européenne.

UNE MEILLEURE ADEQUATION

Un rapport intermédiaire publié en début de semaine dans le cadre des états généraux de l'industrie parvient au même diagnostic en recommandant "une meilleure adéquation des productions avec la demande mondiale".

Ce rapport remis au ministre de l'Industrie Christian Estrosi et consultable sur le site des états généraux (www.etatsgeneraux.industrie.gouv.fr) indique que la part de marché de la France dans les exportations mondiales est passée de 5,8% en 1995 à 3,8% en 2008.

La dégradation est sensible par rapport à l'Allemagne, ajoute le document. "Alors que les exportations françaises de produits manufacturés représentaient en 2000 un montant équivalent à 56% des exportations allemandes, elles n'en représentent plus en 2008 que 37%".

Le rapport relève aussi la faiblesse bien connue des PME françaises, qui "représentent plus de 90% des entreprises en France mais ne génèrent que 17% des exportations".

Les grands groupes français sont en revanche nombreux à conserver un rang de leader à l'international, mais ils produisent bien souvent à l'étranger et n'entrent donc pas dans les statistiques du commerce extérieur.

L'Allemagne, de son côté, voit son modèle menacé à terme par l'autosuffisance à laquelle aspirent les nouvelles puissances émergentes qui sont aujourd'hui le principal débouché de ses exportations.

Edité par Sophie Louet