John Thain a rencontré le directeur général de Bank of America, Kenneth Lewis et les deux hommes ont convenu que la situation n'était pas tenable, a précisé le porte-parole.

Connu pour avoir dirigé NYSE Euronext avant Merrill Lynch, John Thain s'occupait des activités de banque à l'international, du courtage et de la gestion de fortune.

Ses indemnités de départ seront précisées ultérieurement, a indiqué le porte-parole.

Son départ intervient moins d'une semaine après une aide publique de 20 milliards de dollars octroyée à Bank of America pour absorber Merrill. Les pertes de l'ex-grande maison de Wall Street, sans cesse plus lourdes, ont déplu à Kenneth Lewis.

Washington a également accepté de contribuer à éponger les pertes liées à une dette de 118 milliards d'euros. Avec la chute de l'action BofA, Kenneth Lewis lui-même est à présent sur la sellette.

"C'est une énorme crise de crédibilité", commente David Dietze (Point View Financial Services). "Il faut que des têtes tombent."

Tom Montag, un autre ancien responsable de Merrill qui avait repris le volet commercial de Bank of America, le trading et les études, reste en place, contrairement à ce qu'a annoncé la chaîne de télévision CNBC.

Robert McCann, qui devait diriger l'activité commune de courtage, et le patron de la banque d'investissement Greg Fleming sont d'autres anciens hauts dirigeants de Merrill à avoir précédé Thain et Montag dans l'exil.

Il y a encore une semaine Lewis déclarait à des investisseurs qu'il était satisfait que Thain reste.

Bank of America a racheté Merrill le 1er janvier pour 19,4 milliards de dollars.

CNBC rapporte également jeudi que Thain, qui a accédé à la direction générale de Merrill en décembre 2007, a fait redécorer son bureau chez Merrill voici un an, moyennant une facture de 1,22 million de dollars.

Au second semestre de la même année, la banque accusait une perte nette de 12,2 milliards de dollars, les dépréciations sur créances immobilières et autres actifs toxiques s'accumulant.

Après avoir rejoint Bank of America, Thain passait pour être candidat à la succession de Lewis mais le bruit courait qu'il n'avait pas l'intention d'être le subordonné de Lewis, 61 ans, trop longtemps.

Bank of America avait menacé de renoncer à la fusion avec Merrill en décembre après avoir découvert l'étendue des dégâts dans les comptes de l'ancienne star de Wall Street.

Lewis et Thain ont négocié la fusion en moins de 48 heures, le week-end durant lequel Lehman Brothers a déposé son bilan, et on accorde parfois à Thain d'avoir épargné un sort similaire à Merrill.

Bon nombre d'investisseurs et d'analystes ont en revanche reproché à Lewis d'avoir surpayé Merrill et de n'avoir pas renégocié l'opération au moment où les pertes de l'ancienne banque d'affaires sont apparues dans toute leur ampleur. Bank of America a de fait signalé que Merrill avait perdu 15,31 milliards de dollars au quatrième trimestre.

Plusieurs plaintes ont été déposées contre Bank of America cette semaine. La banque est accusée d'avoir conclu cette fusion en toute hâte ou encore de n'avoir pas révélé l'étendue des pertes à temps.

Lewis s'est défendu en déclarant que de hauts fonctionnaires du gouvernement l'avaient pressé, en décembre, de conclure l'affaire rapidement.

L'action BofA perd 15% à 5,75 dollars à Wall Street.

Jon Stempel, version française Wilfrid Exbrayat