par Noëlle Mennella et Dominique Vidalon

Michel-Edouard Leclerc, le président du groupe, a précisé lors d'une interview accordée à Reuters que la croissance des ventes en France, hors carburant, serait supérieure à 5% cette année.

Elles avaient augmenté de 5,6% l'an dernier à 27,2 milliards d'euros, à comparer à des baises de 2,8% pour Carrefour et de 4,8% pour Casino.

L'optimisme de la première enseigne de France s'appuie sur la perspective d'une consommation encore dynamisée en 2010 par une bataille sur les prix qui risque de s'accentuer entre les grands acteurs secteurs, selon le patron des centres Leclerc.

Cette "coopérative de patrons" lancée en 1949 à Landerneau près de Brest par Edouard Leclerc, le père de Michel-Edouard, associe aujourd'hui 600 commerçants indépendants.

Son ambition est d'accroître ses parts de marché en France où elle devance déjà son grand rival Carrefour.

"On est recruteurs nets de consommateurs auprès de toutes les enseignes. On prend des clients partout. Nous allons continuer à investir dans les prix. J'ai choisi de creuser l'écart avec Carrefour", déclare Michel-Edouard Leclerc.

Après le gain de 0,6 point de part de marché à 17% réalisé en 2009, Michel-Edouard Leclerc parie "sur un rythme de 0,4 point en 2010".

CONFIANCE DANS L'HYPERMARCHÉ

Pour parvenir à ses fins, le groupement de commerçants croit, contrairement à d'autres grands distributeurs, aux vertus des hypermarchés qui représentent 88% du parc.

"Cela fait cinq ans qu'on me dit que l'hyper c'est fini et chez nous cela n'a jamais aussi bien marché", assure son président.

Il s'appuie en outre sur le succès de sa marque propre, baptisée "Repère", dont la part dans le chiffre d'affaires du groupe est passée de 3% en 1999 à 33% en 2009, un niveau auquel elle devrait se stabiliser.

Leclerc veut aujourd'hui l'utiliser pour développer des gammes à plus fortes valeurs ajoutées comme le bio ou le commerce équitable.

Par ailleurs, il projette de développer son offre dans le non alimentaire, qui pèse déjà 40% des ventes. Ainsi le groupe veut ouvrir 22 espaces cultures multimédia, une vingtaine de parapharmacie et une douzaine d'agences de voyages, détaille le dirigeant.

Dans ses galeries marchandes, il compte ouvrir une centaine de boutiques spécialisées dédiées à la bijouterie, la culture ou le bricolage.

Leclerc veut même distribuer des médicaments lorsque le secteur sera libéralisé, mais ce projet se heurte à une résistance farouche des pharmaciens et des médecins.

Le distributeur a aussi des ambitions à l'international où il devrait réaliser à la fin de l'année 10% de ses ventes contre 7,5% en 2009. Sur les 520 centres Leclerc que compte l'enseigne, 110 sont à l'étranger (Italie, Espagne, Portugal, Pologne, Slovénie, Etats baltes).

"Que peut-on espérer en France ? Peut-être gagner deux points de parts de marché en cinq ans. Nous cherchons donc à nous développer en Europe. Mon ambition est d'être dans le 'top 10' de la distribution alimentaire en 2020. Nous prospectons", déclare Michel-Edouard Leclerc.

LES ÉMERGENTS HORS D'ATTEINTE

Cette expansion s'effectuera en amont grâce à l'alliance stratégique Coopernic (Coopérative européenne de référencement et de négoce des indépendants commerçants), conclue en 2006 avec les groupes Conad Italie, Coop Swiss, Rewe Allemagne et Colruyt en Belgique.

La taille de cette centrale d'achat lui permet de peser plus efficacement dans les négociations avec les industriels concernant les référencements ou les prestations commerciales mais aussi de fabriquer des marques de distributeurs, explique Michel-Edouard Leclerc.

Mais le groupe veut aller plus loin en réalisant avec ses partenaires de Coopernic des investissements, de l'expansion et de nouvelles affiliations, ajoute-t-il.

Michel-Edouard Leclerc a dit être en train de négocier l'acquisition en Italie d'un groupe d'une dizaine d'hypermarchés tout en recherchant un partenaire en Espagne.

"Mon ambition n'est pas de construire un outil capitalistique. Je ne ferai jamais un 'remake' de Carrefour, de Wal Mart ou de Tesco", prévient-il cependant en excluant l'hypothèse d'une expansion dans les pays émergents.

De même, Michel-Edouard Leclerc se montre très réservé vis-à-vis du "cybermarché" car, dit-il, "la petite taille du marché ne me permet pas de sortir un modèle économique qui serait à la fois moins cher et rentable".

Enfin, il répète que son groupe "ne sera jamais en Bourse".

Michel-Edouard Leclerc a commenté sa stratégie dans son bureau d'Ivry-sur-Seine, où cohabitent des parodies des affiches de mai 1968, des portraits de l'icône révolutionnaire Che Guevara et plusieurs maquettes de caravelles.

édité par Benjamin Mallet