Berne (awp/ats) - L'arrêt de plusieurs centrales nucléaires en France fait bondir les prix de l'électricité en Suisse. Une hausse bienvenue à l'heure où le secteur énergétique boit la tasse.

Les prix pour livraison immédiate en Suisse ont progressé de presque 30% sur une semaine et d'un tiers sur deux semaines.

Sur un mois, la hausse est encore plus marquée. "Les prix pour l'énergie de ruban fournie par les centrales nucléaires et au fil de l'eau en semaine sont ainsi passés de 40 euros (43,30 francs suisses) par mégawatt (MW) en septembre à 60-70 euros/MW aujourd'hui", explique à l'ats Aline Elzingre-Pittet, porte-parole du groupe valdo-soleurois Alpiq.

Quant aux prix de l'énergie de ruban pour livraison le premier trimestre de l'hiver (janvier à mars 2017), ils se négociaient à 40 euros/MW en septembre. Ils s'échangent cette semaine à 63 euros/MW.

"Certains produits non cotés à l'EEX, la Bourse européenne de l'électricité, mais échangés de gré à gré, comme par exemple la livraison pour la pointe de janvier, ont augmenté de plus de 35% en l'espace de quelques heures", précise Sabrina Schellenberg, porte-parole du groupe bernois BKW.

Les prix ont également progressé en France et en Allemagne. Les prix à terme ont, en effet, affiché une hausse d'environ 17%, depuis mi-septembre, sur sol allemand.

LEIBSTADT AU REPOS

Cette croissance est avant tout imputable à la disponibilité restreinte des centrales nucléaires françaises où d'importants contrôles sont effectués. "En France, 23 réacteurs sur les 58 que compte le pays sont à l'arrêt", explique Aline Elzingre-Pittet.

"EDF rencontre des problèmes sur certaines de ses chaudières à vapeur", poursuit Ueli Walther, porte-parole du groupe énergique argovien Axpo. En outre, plusieurs blocs de production au charbon ont été arrêtés, les années passées, sur sol hexagonal.

En hiver, la France reste dépendante de la production de ses centrales thermiques fossiles. Or les ressources de ce pays en la matière ne sont pas illimitées. "Lors de grands froids, la France est presque à la limite de ses capacités de production", indique Ueli Walther. De ce fait, elle doit importer beaucoup d'énergie.

A cela s'ajoute la faible disponibilité des centrales nucléaires allemandes, due au repoussement des révisions à 2017 pour éviter un impôt sur le combustible qui doit disparaître.

En Suisse, le réacteur numéro 1 de Beznau a été mis au repos jusqu'à fin décembre au plus tôt. Et les travaux de maintenance de la plus grande centrale nucléaire helvétique, celle de Leibstadt dans le canton d'Argovie, dureront jusqu'en février, soit plus longtemps que prévu.

ENERGIES FOSSILES PLUS CHÈRES

"Le pétrole, le charbon et le gaz montent de manière globale, ce qui augmente les coûts de production de centrales thermiques, et donc les prix de l'électricité sur le marché de gros en Europe. Mais ceci d'une manière mesurée", informe par ailleurs Sabrina Schellenberg.

L'augmentation du prix du charbon est notamment à mettre sur le compte de la politique chinoise de réduction massive de la production indigène.

Enfin, une demande plus prononcée liée au recul des températures en ce début de mois d'octobre a également contribué au bond des prix en Suisse.

Mais "malgré cette hausse, le niveau des prix reste encore très bas", souligne Céline Reymond, porte-parole de l'Association des entreprises électriques suisses (AES).

"Comme la sensibilité thermique de la consommation française est élevée, due au grand nombre de chauffages électriques, les capacités manquantes pourraient provoquer des pics de prix sur le marché day-ahead (livraison d'électricité pour le lendemain)", note Sabrina Schellenberg.

Selon l'AES, la durée de cette progression dépendra de la disponibilité des centrales nucléaires, des prix des combustibles sur les marchés internationaux et de la situation hydrologique. Ainsi, Beznau 1 fonctionnera de nouveau à la fin de l'année. Mais au premier trimestre de 2017, les combustibles de sept réacteurs nucléaires allemands seront remplacés.

Sur le plan hydraulique, les bassins d'accumulation des barrages contiennent à l'heure actuelle environ 7 térawattheures (TWh). Il s'agit d'un niveau normal pour la saison.

Mais les entreprises suisses actives dans le négoce de l'énergie continueront de saisir les opportunités qui se présentent sur le marché concernant leur production hydroélectrique. Le niveau des lacs d'accumulation risque donc de s'abaisser en conséquence.

ats/jh