* L'interdiction d'occuper un poste offficiel sera rejugée

* Le président Napolitano prône "sérénité" et "cohésion"

* Première condamnation définitive pour le "Cavaliere"

* Il dénonce une persécution, clame son innocence

* Quelles conséquences pour la coalition gouvernementale ? (Actualisé avec réaction de Berlusconi)

par Roberto Landucci et Barry Moody

ROME, 1er août (Reuters) - La Cour de cassation italienne a confirmé jeudi la peine de prison frappant Silvio Berlusconi dans l'affaire Mediaset mais a demandé un réexamen de l'interdiction pour l'ancien président du Conseil d'occuper un poste officiel pendant cinq ans.

Cette décision pourrait affecter la cohésion du fragile gouvernement de "grande coalition" entre le Peuple de la liberté (PDL) de Silvio Berlusconi et le Parti démocrate (PD) de l'actuel président du Conseil, Enrico Letta.

Le président de la République, Giorgio Napolitano, a invité les Italiens à la "sérénité" et à la "cohésion" après l'annonce du jugement.

"Le pays a besoin de retrouver la sérénité et la cohésion sur des questions institutionnelles d'une importance vitale car ses divisions empêchent depuis trop longtemps la mise en oeuvre des réformes", a-t-il dit dans un communiqué.

La cour d'appel de Milan avait confirmé en mai la condamnation du "Cavaliere" à quatre ans de prison, depuis réduits à une année en vertu d'une loi d'amnistie, et à cinq ans d'interdiction d'occuper un poste officiel pour fraude fiscale dans l'affaire de l'achat de droits de retransmission par son empire télévisé Mediaset.

Après trois jours d'audiences, les cinq magistrats de la Cour de cassation ont délibéré pendant plusieurs heures jeudi après-midi.

S'ils ont confirmé la peine de prison frappant l'ancien chef du gouvernement, qui aura 77 ans fin septembre, ils ont demandé au tribunal de Milan de réexaminer la condamnation à cinq années d'interdiction de toute fonction officielle qui lui a été infligée.

Cela permet à Silvio Berlusconi de conserver pour le moment son siège de sénateur.

"PERSÉCUTION"

Il s'agit de sa première condamnation définitive dans la trentaine de procès qui lui ont été intentés pour des accusations allant de la fraude fiscale aux relations sexuelles tarifées avec une mineure - le fameux "Rubygate".

Dans un message vidéo diffusé dans la soirée, Berlusconi a dénoncé la décision de la Cour de cassation et se dit "persécuté" par les magistrats depuis qu'il est entré en politique il y a vingt ans.

Clamant son innocence dans cette affaire, l'ancien président du Conseil affirme que sa condamnation est dénuée de tout fondement. "Je n'ai jamais trempé dans un système de fraude fiscale. Il n'y a pas de fausses facture dans l'histoire de Mediaset", affirme-t-il.

Il ajoute qu'il poursuivra son combat politique et militera pour une réforme du système judiciaire.

L'aile dure du PDL a menacé de quitter la coalition et d'organiser des manifestations publiques, comme jeudi après-midi à Rome avant le jugement, mais le "Cavaliere" n'a cessé d'affirmer que cette affaire ne devait pas mettre en cause la survie du gouvernement actuel.

Nitto Palma, responsable du PDL et ancien ministre de la Justice dans le dernier gouvernement Berlusconi, a déclaré dans la soirée, à l'issue d'une réunion du parti, qu'il y avait "beaucoup d'amertume" après la décision de la Cour de cassation.

"BEAUCOUP D'AMERTUME" AU PDL

"Mais ce jugement ne doit pas avoir de conséquences pour le gouvernement Letta qui a été mis en place pour servir le pays et qui, en ce qui nous concerne, va continuer à le faire", a-t-il cependant ajouté.

La menace pourrait être plus grande du côté du Parti démocrate, dont de nombreux membres ressentent de plus en plus mal la cohabitation avec les partisans de Silvio Berlusconi.

Enrico Letta n'a pas fait de commentaire mais son porte-parole a rappelé l'une de ses précédentes déclarations excluant tout "séisme" politique en raison de cette décision judiciaire.

Compte tenu de son âge, l'ancien président du Conseil effectuera sa peine par le biais d'un travail d'intérêt général ou bien sera assigné à résidence.

Il y a quelques jours, il a pourtant affirmé qu'il tenait à aller en prison si sa condamnation était confirmée.

"Je ne partirai pas en exil, comme Bettino Craxi a été forcé de le faire. Je n'accepterai pas non plus d'être remis entre les mains des services sociaux comme un criminel qui doit être rééduqué", a-t-il dit au journal libéral milanais Libero.

Accusé de corruption, Bettino Craxi, président du Conseil socialiste entre 1983 et 1987, s'était enfui en Tunisie en 1994 pour échapper à la prison. Il est mort en exil à Hammamet en janvier 2000.

Selon ses partisans, Silvio Berlsuconi continuera à diriger le parti qu'il a fondé. Mais certains observateurs s'attendent à ce que sa fille aînée Marina, 46 ans, qui préside sa holding Fininvest, le remplace à la tête du PDL.

Berlusconi, qui a été quatre fois à la tête du gouvernement italien depuis son entrée en politique en 1994, estime être injustement poursuivi par une justice qu'il accuse d'être orientée à gauche. (Danielle Rouquié et Guy Kerivel pour le service français)