* L'UE propose de modifier sa législation sur les OGM

* Les Etats membres pourront restreindre ou interdire des produits

* Les Etats-Unis veulent l'ouverture du marché européen

par Philip Blenkinsop

BRUXELLES, 22 avril (Reuters) - La Commission européenne a proposé mercredi une nouvelle loi qui permettrait aux Etats membres de l'UE de restreindre ou d'interdire sur leur territoire l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés (OGM) autorisés à l'échelle de l'Union.

"Des changements sont nécessaires pour tenir compte de l'avis de l'opinion publique dans les Etats membres et permettre à des gouvernements nationaux de faire davantage entendre leur voix", a déclaré l'exécutif européen dans un communiqué, en rappelant que ce réexamen était l'un des engagements pris par la nouvelle Commission lors de sa désignation l'an dernier.

La proposition, applicable aux OGM utilisés dans l'alimentation humaine aussi bien qu'animale, a suscité la colère des Etats-Unis, qui souhaitent une ouverture totale du marché européen à leurs OGM dans le cadre du traité de libre échange transatlantique en cours de négociation.

Michael Froman, le représentant américain au Commerce, a exprimé sa déception face à une proposition qui, selon lui, reviendra à fragmenter l'Union européenne en 28 marchés séparés pour certains produits. "Proposer ce genre d'action de nature à restreindre les échanges commerciaux n'est pas constructif", a-t-il déclaré dans un communiqué.

La proposition de la Commission a aussi suscité des critiques d'associations de protection de l'environnement, qui craignent que la nouvelle législation laisse les Etats membres sans base légale face à d'éventuelles ripostes judiciaires de firmes biotechnologiques américaines.

Dans un communiqué commun, trois fédérations d'industriels et de négociants en céréales ont quant à elles jugé que les propositions de la Commission constituaient une "gifle" pour le secteur européen du bétail et un revers pour le marché unique.

LA COMMISSION DANS LE SILLAGE DU PARLEMENT EUROPÉEN

La Commission indique que les Etats membres refusant un produit devront se fonder sur des "motifs légitimes autres que ceux liés aux risques pour la santé humaine ou animale, ou pour l'environnement, qui sont examinés à l'échelle de l'Union."

La nouvelle législation ferait écho à celle adoptée le mois dernier par le Parlement européen, qui accorde aux Etats membres un droit de refus similaire concernant cette fois la culture de plantes transgéniques sur leur sol.

Très utilisés aux Etats-Unis et en Asie, les OGM divisent l'opinion en Europe. Le Royaume-Uni y est généralement favorable alors que la France et d'autres pays s'y opposent.

Une seule culture OGM est actuellement pratiquée en Europe, celle du maïs MON810 de Monsanto, en Espagne et au Portugal. Mais 58 autres produits sont autorisés pour l'alimentation humaine et animale dans l'UE, selon la Commission.

Selon le groupement professionnel EuropaBio, l'exécutif européen n'a plus délivré d'autorisation depuis novembre 2013 alors que 59 produits sont en attente d'une décision, dont 17 qui ont d'ores et déjà satisfait aux tests de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), agence indépendante qui conseille la Commission.

La proposition législative de la Commission va être maintenant transmise au Parlement européen. (Avec la contribution de Barbara Lewis et Krista Hughes à Washington, Véronique Tison pour le service français, édité par Marc Angrand)