BRUXELLES, 21 avril (Reuters) - L'Union européenne a menacé jeudi de sanctionner le gouvernement macédonien qu'elle accuse de faire obstacle à la résolution du blocage politique du pays, à la suite de l'échec de négociations sous égide européenne.

Le petit pays des Balkans, en première ligne de la crise des migrants, traverse d'intenses turbulences politiques depuis février 2015, quand l'opposition a accusé le Premier ministre d'alors, Nikola Gruevski, et son chef du contre-espionnage d'avoir mis sur écoute téléphonique près de 20.000 personnes, notamment des juges et des journalistes.

Selon un accord négocié par l'UE, la classe politique macédonienne s'est engagée l'année dernière à désigner un procureur pour enquêter sur le scandale et à organiser des élections anticipées, mais ce processus est au bord de la rupture.

L'Union européenne est prête à envisager des interdictions de voyage et un gel des actifs européens des responsables politiques qu'elle juge responsables du blocage, a dit un responsable européen prenant part aux négociations et qui s'exprimait sous le sceau de l'anonymat.

Ce responsable a ajouté que la Macédoine risquait d'être mise à l'écart de la scène internationale si le gouvernement ne parvient pas à mettre fin à la crise qui dure depuis 14 mois.

La semaine dernière, le scandale a été encore relancé quand le président Gjorge Ivanov a gracié 56 personnalités politiques de la majorité et de l'opposition, dans le cadre de l'amnistie générale qu'il a décrétée dans l'affaire des écoutes.

"Nous sommes extrêmement inquiets du manque de vision du gouvernement actuel. L'UE est disposée à prendre des sanctions contre les hommes politiques qui bloquent la résolution de la crise. La Macédoine s'achemine vers un isolement international", a dit le responsable européen.

Le commissaire européen pour la Politique régionale et de l'intégration européenne, Johannes Hahn, ainsi que trois députés européens médiateurs des discussions, ont admis plus tôt l'échec de leurs efforts pour réunir les leaders politiques du pays vendredi à Vienne.

L'opposition a fait savoir qu'elle ne prendrait part aux discussions que si le président annulait les amnisties. Elle réclame également le report des élections prévues le 5 juin, jusqu'à ce qu'un processus électoral libre et équitable soit mis en place et appelle au boycott dans le cas contraire.

La crise pourrait compromettre les tentatives d'adhésion du pays à l'Union européenne et à l'Otan.

"Nous regrettons profondément ces mesures rétrogrades qui éloignent un peu plus le pays de ses aspirations à accéder à l'Union européenne. En l'absence de progrès, nous sommes maintenant forcés de considérer des actions supplémentaires", ont dit les médiateurs européens.

La mise à jour des listes électorales constitue un des premiers pas nécessaires à la tenue d'élections crédibles, a expliqué le responsable européen.

Les Etats-Unis et d'autres pays ont appelé le président macédonien à reconsidérer la mesure d'amnistie, mais ce dernier n'a pas changé sa position. (Robin Emmott; Julie Carriat pour le service français)