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par Lewis Krauskopf

NEW YORK, 19 juin (Reuters) - Nvidia est devenue l'entreprise la mieux valorisée en Bourse au monde à la suite d'une ascension vertigineuse de l'action, signe que les investisseurs s'attendent à ce que l'intelligence artificielle (IA) générative joue un rôle prépondérant dans l'économie mondiale au cours des prochaines années.

Le titre Nvidia a pris 3,5% mardi, permettant au fabricant de semi-conducteurs dont les puces sont la référence pour l'IA, de disposer d'une capitalisation boursière d'environ 3.340 milliards de dollars. Le spécialiste des cartes graphiques et autres composants a ainsi dépassé Microsoft et Apple qui se disputaient la première place ces derniers jours.

L'action Nvidia a progressé de plus de 170% depuis le début de l'année et d'environ 1.100% depuis son plus bas niveau d'octobre 2022.

Les bénéfices exceptionnels et l'enthousiasme croissant des investisseurs à l'égard de l'IA alimentent la ferveur autour de Nvidia, qui est passé d'une capitalisation boursière de 2.000 milliards de dollars à 3.000 milliards de dollars en seulement 96 jours.

En comparaison, il a fallu 945 jours à Microsoft pour passer de 2.000 milliards de dollars à 3.000 milliards de dollars, tandis qu'Apple a mis 1.044 jours pour effectuer le même saut, selon Bespoke Investment Group.

D'après Howard Silverblatt, analyste spécialisé sur les indices chez S&P Dow Jones Indices, depuis 1925, seules 11 entreprises américaines sont parvenues à la première place en termes de capitalisation boursière au moment de la clôture à New York.

LE SORT DE CISCO

Au cours des dernières décennies, les anciens détenteurs de la première place en termes de valorisation boursière ont enregistré des fortunes diverses. Microsoft a atteint ce rang à la fin des années 1990, mais le titre a ensuite traversé une mauvaise passe pendant des années au début des années 2000, à la suite de l'éclatement de la bulle internet, avant de revenir en force dans la seconde moitié de la dernière décennie.

La compagnie pétrolière Exxon Mobil est devenue l'entreprise la mieux valorisée au monde dans les années 2000, avant de perdre sa couronne à la suite d'une baisse des prix du pétrole.

Le sort de Cisco, dont l'action a culminé à plus de 80 dollars en mars 2000, en plein boom de l'internet, période durant laquelle les investisseurs ont souvent attribué des valorisations vertigineuses aux entreprises liées à l'internet, est pour certains experts l'exemple type dont il faut se méfier.

Les analystes de Bespoke ont récemment comparé les trajectoires de Nvidia et de Cisco, dont les produits étaient considérés comme essentiels pour soutenir l'infrastructure de l'internet.

"Le rallye de Nvidia a été incroyable, mais la société devra continuer à croître et à repousser la concurrence pour que le titre continue d'offrir des rendements exceptionnels", écrit Bespoke dans une note récente.

Pour le moment, les résultats dégagés par Nvidia soutiennent le cours de l'action. Le chiffre d'affaires trimestriel a plus que triplé à 26 milliards de dollars, tandis que le bénéfice net trimestriel a été multiplié par sept à 14,9 milliards de dollars.

Le chiffre d'affaires sur l'ensemble de l'exercice annuel en cours devrait pratiquement doubler pour atteindre 120 milliards de dollars, puis augmenter encore de 33% au cours de l'exercice 2026, pour atteindre 160 milliards de dollars, selon les données de LSEG.

Malgré l'envolée du cours de l'action Nvidia, certains critères témoignent désormais d'une certaine prudence sur la valorisation du groupe.

Le ratio cours/bénéfice prévisionnel de Nvidia s'élève actuellement à 43, selon LSEG Datastream. Ce chiffre est certes supérieur au niveau de 25 atteint au début de l'année, mais il est inférieur aux niveaux établis pendant la majeure partie de 2023. En comparaison, le S&P 500 se négocie à 21 fois le bénéfice attendu.

L'enthousiasme suscité par le potentiel de l'IA s'observe aussi sur d'autres titres, notamment sur Super Micro Computer et Arm Holdings qui ont également fortement augmenté depuis le début de l'année.

(Reportage Lewis Krauskopf à New York, avec les contributions de Saqib Iqbal Ahmed à New York et de Noel Randewich à Oakland, en Californie; version française Claude Chendjou, édité par Blandine Hénault)