L'avion de transport militaire, plombé par des retards et des dérapages de coûts estimés à 55% de son budget initial, a fait l'objet d'une nouvelle réunion jeudi à Berlin en vue de définir les modalités du partage des surcoûts entre le constructeur et les sept pays à l'origine du programme.

Le coût du développement de l'A400M, assemblé par Airbus, filiale d'EADS, était initialement évalué à 20 milliards d'euros. Selon un audit du cabinet PriceWaterhouseCoopers, 11 milliards d'euros d'investissements supplémentaires pourraient être nécessaires.

"Ils (EADS et les pays clients, ndlr) ont commencé à négocier mais ce qui est demandé et ce qui est proposé reste très éloigné", a-t-on déclaré de source proche des discussions.

Selon le quotidien La Tribune, qui cite une source proche du dossier, EADS aurait proposé d'assumer 800 millions d'euros de surcoûts.

Un porte-parole d'EADS a de son côté confirmé que les discussions étaient "difficiles" mais que l'objectif du groupe européen d'aéronautique et de défense, maison mère d'Airbus, et des pays clients demeurait de parvenir à un accord d'ici à la fin du mois de janvier. Il a également confirmé que les discussions reprendraient vendredi.

SITUATION "GRAVE"

Un haut responsable industriel a pour sa part souligné que les pays clients (France, Belgique, Allemagne, Royaume-Uni, Espagne, Luxembourg et Turquie) devaient "réaliser" à quel point la situation était "grave" pour EADS.

Louis Gallois, président exécutif d'EADS, a expliqué le 12 janvier que son groupe perdait 100 à 150 millions d'euros par mois sur le programme A400M. La société a déjà passé 2,4 milliards d'euros de "provisions A400M" dans ses comptes.

EADS, qui veut préserver son équilibre financier et l'avenir de plusieurs projets stratégiques comme celui du futur avion long courrier A350 XWB, veut obtenir une solution équilibrée.

Le ministre de la Défense allemand, Karl-Theodor zu Guttenberg, a néanmoins affirmé au journal Bayernkurier que la patience de son gouvernement était "limitée".

L'audit de PWC, dont Reuters a obtenu une copie, souligne que les coûts du programme A400M ont été en permanence sous-évalués. Selon PWC, EADS est en mesure de supporter jusqu'à 7,6 milliards d'euros de pertes sur l'appareil.

Mais il ajoute qu'une augmentation du capital d'EADS pourrait être indispensable si les négociations échouaient et si les coûts poursuivaient leur inflation. Cette éventualité pourrait amener les actionnaires français et allemands de l'entreprise, qui fête ses dix ans cette année, à redéfinir son contrôle.

"Cela pose un problème beaucoup plus complexe pour les Etats français et allemands. Ce n'est pas seulement l'histoire de l'A400M et il pourrait y avoir des conséquences indirectes, c'est très délicat", a réagi Christophe Menard, analyste chez Bryan Garnier & Co.

"Cela pourrait amener certains pays à changer de position dans les négociations", a-t-il ajouté.

Jeudi, l'action EADS a reculé de 2,8% à 14,40 euros à la Bourse de Paris.

Sabine Siebold, Brian Rohan, Tim Hepher, Matthias Blamont, édité par Danielle Rouquié