Alphavalue - Notre conviction sur Veolia Environnement a été mise à rude épreuve au S2, suite aux problèmes liés aux désengagements/réorganisations de certaines activités, de sorte que le momentum sur le cours s’est essoufflé.

Nous écrivions il y a quelque temps que l’histoire du groupe était celle d’une déconsolidation de dette pour Vivendi, au début des années 2000, créant un spin-off très endetté, dont le dilemme était à la fois de croître, notamment à l’étranger face à la saturation de son marché domestique oligopolistique que le groupe se partage avec son compère Suez et de réduire sa dette. Deux situations plutôt contradictoires. La partie facile du travail (l’investissement) a déjà été effectuée, mais celle plus désagréable du désendettement, menée par M. Frérot, a pris plus de temps et n’a réellement commencé qu’en 2011, en raison des désaccords entre le management et son conseil d’administration. Rattrapé par le ralentissement de l’activité dans le secteur des services environnementaux, et par la pression sur les prix dans son activité principale de l’eau (consommation d’eau, volonté politique…), le management est parvenu à recentrer le groupe sur ses marchés les plus importants.

En l’espace de deux années, le groupe s’est séparé de ses activités au Royaume-Uni (1,45Md€), au Maroc (370m€), de ses 25% dans BerlinWater pour 590m€ (puis plus tard le solde), et a résolu une dispute de longue date avec EDF au sujet de Dalkia (un fournisseur de chauffage maintenant divisé en deux, EDF contrôlant l’activité française et Veolia à l’international) tout en cédant de nombreuses plus petites unités, et la rumeur voudrait que le groupe soit prêt à entretenir des offres pour sa filiale spécialisée dans l’ingénierie d’eau Sade. Au total, le groupe est parvenu à récolter 3,5Mds€ et à déconsolider 1,4Md€ de dettes liées à BerlinWater, tout en introduisant une nouvelle organisation par pays, et non plus par activités, et un programme de réduction de coûts de 270m€ et 470m€ d’ici 2014-2015.

Du très bon travail dans l’ensemble, sauf que le groupe n’est pas parvenu à se débarrasser de sa véritable épine dans le pied qu’est Transdev. Le groupe prévoyait de réduire sa participation dans l’operateur de transport à 40% (voire 20%), ce qui lui aurait permis de déconsolider encore 900m€ de dettes et d’envisager une sortie définitive du secteur. A ce jour aucune avancée sur ce dossier n’a encore été enregistrée et la précondition selon laquelle les problèmes de la SNCM (la société de ferry Corse déficitaire) devaient être résolus avant qu’une cession ne puisse être réalisée montre qu’encore une fois, et au grand désespoir des actionnaires, que le management n’est pas libre d’agir. L’Union Européenne attaque la France pour subventions illégales distribuées à la SNCM (pour un montant qui pourrait atteindre 440m€), une somme que l’entreprise serait incapable de rembourser et qui la pousserait à mettre la clé sous la porte. Une situation inacceptable d’un point de vue politique puisque l’entreprise assure la continuité territoriale entre le continent et l’île de Beauté. En plus des coûts potentiels supplémentaires pour Veolia, qui clame pourtant n’être aucunement responsable, cette malheureuse histoire empêche la finalisation de toute transaction avec la CDC au sujet de Transdev (pourtant attendue depuis octobre 2013). Nous voyons dans ce retard la principale cause de la piètre performance du cours lors des 3 derniers mois, les investisseurs se contentant d’attendre que la situation soit clarifiée, peut-être lors de la publication des résultats le 27 février.

Des rumeurs dans la presse font également état des intentions des adversaires de M. Frérot au conseil d’administration de faire usage de ce retard sur le dossier SNCM pour réaliser un petit coup d’état, faisant ainsi revenir sur le devant de la scène les problèmes de gouvernance. Ce qui est tout à fait inacceptable. Il y a deux ans déjà nous avions mis en évidence l’inutilité du conseil d’administration en indiquant que « la vraie question est de savoir pourquoi il a fallu 2 ans pour que le conseil d’administration de Veolia – 18 membres appartenant à la crème de la crème, dont pas moins de 5 banquiers/assureurs, et 6 patrons (certains ex) issus de sociétés du CAC40, plus une poignée de grandes figures étrangères - se rende compte des dégâts laissés derrière lui par l’ancien patron de Veolia M. Proglio. La gouvernance de Veolia doit de toute évidence être remaniée afin de restaurer la confiance d'une manière durable. »

Nous sommes néanmoins convaincus que le groupe se trouve aujourd’hui en bien meilleure posture pour profiter d’un potentiel redémarrage économique. Moins de dette, une réduction des coûts ainsi qu’une base de comparaison favorable devraient permettre aux actionnaires d’entretenir un certain espoir.

Du point de vue de la valorisation, nous entrevoyons un potentiel de hausse non négligeable de plus de 10%.

La valorisation nettement plus basse sur la base des multiples de P/E et d’EBITDA ne devrait pas être la source d’inquiétudes significatives puisque le traitement comptable par mise en équivalence d’un certain nombre de filiales (Dalkia international, Proactive, Shenzen…) depuis 2013 et la faiblesse du résultat net, qui devrait malgré tout croitre de façon progressive dans les années à venir, expliquent cette survalorisation. Ce qui nous pousse à croire que le potentiel de hausse est en réalité bien supérieur aux 11% affichés, à supposer que la gouvernance ne redevienne pas source d’inquiétudes, faisant fuir les investisseurs et capant la performance du titre... au moins jusqu’au prochain conseil d’administration, le 26 février.