Bombay (awp/afp) - La banque centrale indienne a abaissé mardi son principal taux directeur à son plus bas niveau depuis six ans pour soutenir la croissance du pays, que le Fonds monétaire international (FMI) prévoit à nouveau forte pour 2016-2017.

La Reserve Bank of India (RBI), dont c'est la première décision sous le mandat du nouveau gouverneur Urjit Patel, a pris la décision de diminuer de 25 points de base le taux auquel elle prête aux banques commerciales, l'amenant à 6,25% contre 6,50% auparavant.

Il faut remonter à novembre 2010 pour retrouver ce taux à un si bas niveau.

Urjit Patel a succédé le mois dernier au poste de gouverneur de la RBI au charismatique Raghuram Rajan, qui avait été accusé par une partie de la droite hindoue de privilégier la maîtrise de l'inflation à la croissance.

Après une bonne mousson, "la perspective pour l'activité agricole s'est considérablement éclaircie", a déclaré M. Patel dans un communiqué de la RBI pour expliquer la décision.

Une mousson abondante est vitale pour l'économie indienne, pays de 1,2 milliard d'habitants encore très rural. Deux années consécutives de maigres précipitations avaient pesé sur la production agricole et fait grimper l'indice des prix à la consommation.

Grâce à la conjoncture météorologique favorable, l'inflation est déjà retombée en août à un plus bas depuis cinq ans.

L'abaissement "surprise" du principal taux directeur indique que le nouveau banquier central de l'Inde priorise désormais la croissance "au risque de manquer ses objectifs en termes de contrôle de l'inflation", a estimé Shilan Shah, analyste à Capital Economics.

"Nous pourrions voir d'autres baisses, modestes, au cours des prochains mois. Mais la marge de manoeuvre pour une réduction drastique est limitée", prévient-il.

Des taux d'intérêts bas incitent à la consommation, au risque cependant de relancer l'inflation à cause de l'afflux de liquidités.

L'Inde connaît l'expansion la plus rapide des grandes économies mondiales.

Dans ses prévisions annuelles publiées mardi, le FMI projette encore un rythme de croissance soutenu à 7,6% sur 2016/2017 pour le géant démographique d'Asie du Sud.

Le Fonds salue notamment certaines réformes structurelles du gouvernement de Narendra Modi, comme l'introduction d'une TVA harmonisée à travers le pays, tout en mettant en garde contre les tendances inflationnistes de l'économie indienne.

- Décision collective -

Le passage de relais à la tête de la RBI s'est aussi traduit par une modification statutaire du processus de prise de décision, une première dans l'histoire de cette banque centrale.

Auparavant, le gouverneur seul avait la haute main sur les décisions de politiques monétaire, l'avis du comité étant consultatif.

Désormais, c'est un panel de six personnes, dont le gouverneur, qui décide lors d'un vote à la majorité des éventuelles évolutions du taux.

Le vote du gouverneur est décisif en cas d'égalité, mais il ne peut en aucun cas mettre son veto ou refuser la décision du comité.

Un dispositif similaire existe à la Banque d'Angleterre.

Les six membres du comité de politique monétaire ont voté en faveur d'une baisse du principal taux directeur à 6,25%, a indiqué la RBI dans un communiqué.

Les trois ans de l'unique mandat de M. Rajan avaient été marqués par le maintien des taux d'intérêt à des niveaux encore élevés, bien qu'abaissés à leur plus bas depuis 2011.

Des réductions insuffisantes et trop lentes pour ses critiques, qui l'avaient accusé de sacrifier des points de croissance au nom de la lutte contre l'inflation.

Il est toutefois mis au crédit de l'ex-gouverneur d'avoir réussi à contrôler la hausse de l'indice des prix à la consommation, d'avoir enrayé la chute de la roupie indienne et d'avoir créé un environnement stable pour la croissance.

afp/rp