(Complété tout au long avec citations, précisions, réactions)

PARIS, 26 février (Reuters) - La justice a enjoint mardi soir à l'éditeur du livre "Belle et bête", dans lequel une ancienne maîtresse évoque en termes crus sa liaison avec Dominique Strauss-Kahn, d'y insérer un encart faisant état de sa condamnation pour atteinte à l'intimité de la vie privée.

Le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a également ordonné au Nouvel Observateur, qui avait publié jeudi des bonnes feuilles de cet ouvrage, de diffuser sur sa prochaine "une" la mention de cette condamnation.

L'ancien directeur général du Fonds monétaire international (FMI), qui dénonçait une machination à des fins mercantiles, "est très satisfait de cette décision", a déclaré sur BFM TV l'un de ses avocats, Me Henri Leclerc.

Ses conseils, qui avaient assigné lundi l'éditeur et l'auteur du livre ainsi que l'hebdomadaire, se sont également réjouis de cette décision de justice, qui va différer la publication de "Belle et bête".

"On n'a pas le droit, quel que soit l'homme, d'entrer dans l'intimité des gens", a déclaré Me Henri Leclerc sur BFM TV.

"On ne peut pas aller toujours plus loin dans le trash (...) Aujourd'hui, la justice vient dire qu'il fait retrouver nos repères, qu'il faut retrouver nos valeurs", a de son côté réagi sur i>télé Me Richard Malka.

L'auteur du livre, Marcela Iacub, juriste et chercheuse d'origine argentine, ainsi que l'éditeur Stock, ont été condamnés à payer 50.000 euros de dommages et intérêts à l'ancien ministre des Finances. Le Nouvel Observateur a été condamné à lui verser 25.000 euros de dommages et intérêts.

Dominique Strauss-Kahn s'était rendu en personne mardi au tribunal pour dénoncer, devant la juge des référés, "le caractère méprisable de ce texte". À la sortie de l'audience, il s'était dit "complètement dégoûté".

"Où est la morale là-dedans ?", avait-il lancé, affirmant que la sortie du livre, sa couverture avaient été délibérément cachées. "Tout cela pour faire de l'argent, sans aucun souci de la dévastation que ça pouvait faire de ma vie personnelle, de ma vie familiale ou de celle de mes enfants".

"VÉRITABLE MACHINATION"

La liaison de Marcela Iacub avec "DSK" a débuté fin janvier 2012, peu avant la mise en cause de l'ancien ministre socialiste pour proxénétisme aggravé dans l'affaire du Carlton de Lille. Elle s'est poursuivie après sa mise en examen jusqu'au mois d'août, selon la juriste.

Elle dit avoir rencontré Dominique Strauss-Kahn après la publication de son livre "Une société de violeurs" et y décrit l'ancien ministre des Finances en termes peu amènes.

L'un des avocats de l'ancien patron du FMI, Me Jean Veil, a dénoncé une tromperie de la part de Marcela Iacub. "Dès que la relation entre les deux a commencé, elle a feint d'être amoureuse pour rester proche de Dominique Strauss-Kahn et pouvoir écrire ce livre", a-t-il déclaré.

Un peu plus tôt lors de sa plaidoirie, il avait dénoncé "les motivations mercantiles d'une bande organisée qui s'est livrée à une véritable machination."

"M. Strauss-Kahn, depuis deux ans, il fait recette, l'argent est là, il suinte de partout", avait-il fait valoir. "C'est un livre qui devrait être dans les cabinets d'aisance et dont on devrait faire l'usage intime de son choix."

Les conseils de "DSK" avaient produit en audience un courriel de Marcela Iacub dans lequel cette dernière confiait à son ancien amant "avoir servi d'instrument pour lui nuire."

"Je me suis laissée entraînée dans un projet. Il m'a fallu te faire croire que j'étais éprise de toi, folle de toi, je suis désolée", écrivait-elle.

L'essayiste, qui n'était pas présente mardi, avait indiqué lundi à son avocat qu'elle ne se souvenait pas de ce courriel. Elle assume totalement la publication de cet ouvrage et affirme n'avoir été manipulée par personne, a dit Me Christophe Bigot, qui assure également la défense de la maison d'édition Stock. (Marine Pennetier, Sophie Louet et Chine Labbé, édité par Jean-Loup Fiévet)