Londres (awp/afp) - Mark Carney, dont le successeur à la tête de la Banque d'Angleterre (BoE) a été nommé vendredi, aura eu la lourde tâche de guider la politique monétaire du pays dans les eaux agitées du Brexit.

Alors que la fin de son mandat approche, Ce Canadien de 54 ans se prépare à affronter une autre tempête: le réchauffement climatique, cette fois en tant qu'envoyé spécial de l'ONU.

Annonçant vendredi le nom de son successeur - Andrew Bailey - , le ministre des Finances Sajid Javid a estimé que Mark Carney avait dirigé la Banque centrale "avec conviction, rigueur et intelligence à l'un des moments les plus difficiles de son histoire".

"Mark Carney part sur un bilan honorable. Sous sa gouverne, la Banque d'Angleterre a traversé une période d'extrême incertitude économique et politique", constate Ruth Gregory, de la maison de recherche Capital Economics, interrogée par l'AFP.

Arrivé à l'été 2013 pour cinq ans, Mark Carney a vu son mandat prolongé plusieurs fois, d'abord pour un an, puis pour six mois, et enfin d'un mois et demi, afin de garantir un minimum de stabilité après le bouleversement provoqué par la décision des Britanniques, en juin 2016, de sortir de l'Union européenne.

Critiqué par les partisans du Brexit pour ses mises en garde à répétition et ses prévisions moroses sur les conséquences économiques d'un départ du Royaume-Uni, ce grand brun grisonnant à la mâchoire carrée avait opté dans la foulée du référendum de juin 2016 pour une baisse du taux d'intérêt de la banque afin d'aider l'économie à franchir le choc de ce vote surprise.

Depuis, il n'a cessé de rassurer les marchés en répétant que la Banque d'Angleterre était prête à tout pour stabiliser l'économie en cas de Brexit désordonné, tout en jugeant une telle hypothèse peu probable.

Désormais, la victoire de Boris Johnson aux dernières élections laisse entrevoir une approbation rapide par le Parlement britannique de l'accord négocié avec Bruxelles. Avec les discussions sur la future relation commerciale s'ouvre une nouvelle séquence à haut risque au moment où M. Carney s'apprête à laisser la main à Andrew Bailey en mars.

"Pas fiable"

Malgré son expérience, ce diplômé des universités d'Harvard et Oxford, qui a passé 13 ans à la banque d'affaires Goldman Sachs avant de rejoindre la fonction publique, puis de prendre la tête de la Banque centrale du Canada en 2008, s'est rapidement attiré le critiques.

En juin 2014, alors que la reprise économique peinait toujours à se concrétiser au Royaume-Uni après la crise financière, M. Carney avait pris de court investisseurs et observateurs en prévenant que le taux directeur pourrait être relevé plus tôt qu'attendu du niveau historiquement bas de 0,50% auquel il stagnait depuis cinq ans.

Ce relèvement n'a finalement eu lieu qu'en août 2018, le gouverneur le repoussant mois après mois en raison de la montée des inquiétudes sur la croissance européenne ou chinoise et sur les conséquences du Brexit.

Ces revirements avaient valu à ce père de quatre filles et marié à une Britannique le surnom de "petit ami pas fiable", peu enviable pour un banquier central censé incarné la stabilité.

Ces derniers mois, Mark Carney s'est illustré par ses positions à l'égard des cryptomonnaies et notamment du projet Libra, et par son engagement en faveur du climat qui lui a valu d'être nommé futur envoyé spécial de l'ONU pour traiter ce sujet, en remplacement de Michael Bloomberg.

S'il a averti que la future monnaie virtuelle du géant américain devra répondre à des normes strictes en matière de régulation, il a également reconnu que ces nouveaux moyens de paiement pouvaient être bénéfiques pour les consommateurs.

Concernant le climat, c'est sous son égide que la Banque d'Angleterre a lancé un projet pionnier de tests de résistance visant à évaluer d'ici à 2021 les risques que fait courir le réchauffement de la planète sur le système financier.

afp/fr