par Hyonhee Shin et James Pearson

SEOUL, 10 février (Reuters) - La soeur cadette du dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a été reçue à déjeuner samedi par le président sud-coréen, Moon Jae-in, qui ne cache pas sa volonté de faire des Jeux olympiques de Pyeongchang un outil de son projet de relance du dialogue avec le Nord.

Premier membre de la dynastie des Kim à se rendre au Sud depuis la guerre de Corée (1950-53), Kim Yo-jong est arrivée vendredi en Corée du Sud où elle a assisté à la cérémonie d'ouverture des Jeux d'hiver. Le vice-président américain, Mike Pence, était également présent mais a évité tout contact avec la délégation nord-coréenne.

Les deux Corées ont fait défiler leurs délégations sous la bannière de la réunification lors de la cérémonie à Pyeongchang, à 80 km de la ligne de démarcation séparant les deux Corées, tandis que Moon Jae-in et Kim Yo-jong échangeaient une poignée de mains remarquée.

Elu en mai dernier, Moon Jae-in, qui est favorable à une reprise du dialogue avec le Nord, n'a pas épargné ses efforts pour que les Jeux de Pyeongchang, qui s'achèveront le 25 février, permettent d'atténuer les tensions dans la péninsule coréenne autour des ambitions nucléaires et balistiques de Pyongyang.

A son entrée samedi dans la salle de la Maison bleue, le siège de la présidence à Séoul, où l'attendait Kim Yo-jong et les autres membres de la délégation de Pyongyang, le président sud-coréen leur a dit, devant les caméras de télévision, avoir apprécié qu'ils aient assisté dans le froid à la cérémonie d'ouverture des Jeux. "Vous allez tous bien ?", s'est-il enquis auprès d'eux avant que les journalistes soient évacués de la pièce.

Outre la soeur de Kim, le régime de Pyongyang était également représenté par Kim Yong-nam, le président du présidium de l'Assemblée populaire suprême qui fait office de chef d'Etat protocolaire de la Corée du Nord, a précisé la Maison bleue.

La délégation du Sud comprenait le conseiller à la sécurité nationale de Moon, Chung Eui-yong, son directeur de cabinet Lim Jong-seok et le ministre de l'Unification, Cho Myong-gyon.

ÉMISSAIRE PRIVILÉGIÉE

Cette rencontre de haut rang marque l'apogée de plusieurs mois d'un travail engagé par l'équipe de Moon depuis son élection.

Même si elle occupe un rang protocolaire inférieur à celui de Kim Yong-nam, la venue de Kim Yo-jong en Corée du Sud est symboliquement plus spectaculaire parce qu'elle est le premier membre de la famille des maîtres de la Corée du Nord à se rendre au Sud depuis la fin de la guerre mais aussi parce que son frère l'a promue au sein des arcanes du pouvoir, la nommant en octobre dernier membre suppléante du Politburo.

Kim Yo-jong, âgée de 28 ans, dirige aussi le département chargé de la propagande et de l'agitation du Parti des travailleurs, le parti unique de la République populaire démocratique de Corée.

Comme Kim Jong-un, sa mère est la quatrième épouse de Kim Jong-il, Ko Yong Hui. Comme son frère aîné, elle a semble-t-il effectué une partie de ses études en Suisse. D'après un ancien cuisinier japonais de leur père, Kenji Fujimoto, qui les avait surnommé "le prince et la princesse", ils étaient tous deux les favoris de Kim Jong-il.

"En vertu de ses liens familiaux, elle est parmi les interlocuteurs les plus crédibles que la Corée du Nord ait envoyés en émissaire. S'il y a un message à transmettre à la Corée du Sud ou aux Etats-Unis, elle est largement bien placée pour le faire", souligne Christopher Green, spécialiste des affaires coréennes au sein de l'International Crisis Group.

Ses attributions lui ont cependant valu d'être placée sur une liste noire du département américain du Trésor pour censure et graves atteintes aux droits de l'homme. (avec James Pearson à Pyeongchang Henri-Pierre André pour le service français)