KYIV (Reuters) - La ville de Bakhmout, à l'est de l'Ukraine, a subi lundi d'intenses tirs d'artillerie de la part des forces russes dans ce qui semble être le prélude à une nouvelle offensive majeure de Moscou à l'approche de la date-anniversaire de l'invasion russe en Ukraine.

Les soldats ukrainiens, qui résistent depuis des mois, se préparent à de nouvelles attaques terrestres, ont déclaré des responsables militaires ukrainiens.

Les positions à Bakhmout ont été renforcées et seules les personnes ayant un rôle militaire ont été autorisées à entrer dans la ville, a déclaré un commandant adjoint de bataillon. Les civils qui voudraient encore quitter Bakhmout devront braver les tirs, a-t-il ajouté.

La prise de Bakhmout est devenue un objectif majeur pour le président russe Vladimir Poutine. La ville, pratiquement vidée de ses quelque 70.000 habitants d'avant la guerre par des mois de bombardements, est en grande partie détruite.

Sa capture donnerait à la Russie un nouvel ancrage dans la région de Donetsk dont elle cherche à prendre le contrôle et lui offrirait une rare victoire d'ampleur après avoir subi plusieurs revers militaires ces derniers mois.

À Bruxelles, le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, a dit considérer que l'offensive russe redoutée depuis plusieurs semaines avait déjà commencé.

"Nous ne voyons absolument aucun signe que le président Poutine se prépare à la paix", a-t-il déclaré avant une réunion des ministres de la Défense des pays membres de l'Otan.

"Ce que nous voyons, c'est que le président Poutine et la Russie veulent toujours contrôler l'Ukraine. Nous voyons comment ils envoient plus de troupes, plus d'armes, plus de capacités", a-t-il déclaré aux journalistes.

L'assaut russe contre Bakhmout est mené par le groupe militaire privé Wagner, qui a réalisé des gains modestes sur le terrain mais constants. Les bombardements russes incessants sur la ville compliquent encore la situation pour les forces ukrainiennes.

"La ville, sa banlieue, tout le périmètre, et essentiellement toute la direction de Bakhmout et Kostiantynivka sont sous un pilonnage fou et chaotique", a déclaré Volodimir Nazarenko, commandant adjoint du bataillon ukrainien Svoboda.

Pour le moment, aucun combat n'a lieu dans le centre-ville, a-t-il dit mais l'armée ukrainienne est prête à faire face à tout assaut.

"La ville est une forteresse, chaque position et chaque rue, presque chaque bâtiment, est une forteresse", a-t-il déclaré.

"ATTAQUES MASSIVES"

Plus tôt lundi, la Russie a affirmé que ses troupes avaient gagné du terrain sur quelques kilomètres le long des lignes de front en Ukraine, mais sans préciser quelle zone de la ligne de front, qui s'étend sur plusieurs régions ukrainiennes au sud et à l'est du pays, avait bougé.

L'armée ukrainienne a fait état de bombardements russes intensifs le long de la ligne de front et indiqué que 16 localités avaient été bombardées près de Bakhmout.

L'armée ukrainienne a déclaré que sur la journée écoulée, ses forces avaient repoussé plusieurs attaques près de Bakhmout ainsi que des assauts dans les régions de Kharkiv, Louhansk et Zaporijjia.

Le gouverneur de Louhansk, Serhi Gaïdaï, a déclaré que les forces russes avaient attaqué la ville de Bilogorivka de tous les côtés avant l'aube lundi.

"Mais nos forces ont riposté là-bas", a-t-il déclaré à la télévision ukrainienne. "C'était la même situation en direction de Kreminna - beaucoup d'entre eux (les Russes) sont apparus là-bas. Mais ils se sont retirés après le combat avec nos forces".

Les préparatifs de l'offensive majeure russe sont déjà en cours, a-t-il ajouté.

"La quantité de bombardements, de frappes aériennes et d'attaques par de petits groupes a déjà augmenté. Nous attendons qu'ils commencent des attaques massives 24 heures sur 24", a-t-il dit.

Reuters n'a pas été en mesure de vérifier de manière indépendante les informations concernant les affrontements sur le terrain.

SOUTIEN DES ALLIÉS

Alors que l'Ukraine plaide sans cesse auprès de ses alliés pour obtenir davantage de munitions et d'armes, une réunion des ministres de la Défense des pays membres de l'Otan est prévue mardi à Bruxelles pour discuter du soutien militaire à Kyiv.

Le ministre ukrainien de la Défense, Oleksiy Reznikov, a déclaré que les principaux points à l'ordre du jour des discussions seront les défenses aériennes, la formation d'une coalition de chars, l'entraînement des troupes et le soutien logistique.

Kyiv affirme avoir besoin d'avions de combat et de missiles à longue portée pour pouvoir contrer une offensive russe majeure et récupérer le terrain perdu.

Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg a déclaré lundi qu'il s'attendait à ce que la question des livraisons d'avions à l'Ukraine soit abordée lors de la réunion.

La Russie, qui a débuté son offensive en Ukraine le 24 février dernier, entendait prendre rapidement le contrôle de la capitale Kyiv. Mais sa tentative a échoué et le conflit a dégénéré en une guerre d'usure qui a fait des dizaines de milliers de morts parmi les soldats et les civils et détruit des villes entières.

Kyiv redoute une nouvelle offensive des forces russes avec la soutien de la Biélorussie. Le pays est un allié de la Russie et a laissé Moscou utiliser son territoire pour attaquer l'Ukraine par le nord, sans pour autant s'être engagé directement dans le conflit.

Lundi, la France a invité ses ressortissants se trouvant en Biélorussie à quitter le pays sans délai. Les États-Unis ont fait de même pour leurs ressortissants présents en Russie.

(Rédigé par Angus MacSwan, reportage Max Hunder, Olena Harmash, Tim Heritage, Pavel Polityuk, Bart H. Meijer et Charlotte Van Campenhout, Blandine Hénault pour la version française, édité par Tangi Salaün et Kate Entringer)

par Pavel Polityuk