(Actualisé début du dépouillement, précisions § 2-3-7-15-16)

par Richard Lough et Alain Iloniaina

ANTANANARIVO, 25 octobre (Reuters) - Les Malgaches ont participé vendredi dans le calme au premier tour d'une élection présidentielle censée mettre fin à la crise politique et économique qui secoue le pays depuis la prise du pouvoir par Andry Rajoelina à la faveur d'un coup d'Etat en 2009.

Aucun sondage sortie des urnes n'a été effectué dans la journée. Aucun des 33 candidats en lice n'ayant le statut de favori, un second tour sera sans doute nécessaire, probablement en décembre.

A Antananarivo, des groupes d'électeurs ont bruyamment fêté le début du dépouillement, en début de soirée. "Il faut sortir de la crise. Pour moi, cette élection est celle de la dernière chance", a déclaré un électeur, Faly Randrianarivo, laborantin.

Les résultats en provenance des 20.000 bureaux de vote seront collectés dans un premier temps dans les provinces avant d'être transmis électroniquement à la Cenit, la commission électorale indépendante, dans la capitale. Les bulletins physiques seront ensuite transportés à travers l'île jusqu'à Antananarivo pour un recomptage.

La Cenit a jusqu'au 8 novembre pour annoncer un résultat provisoire.

"Le vote est bien organisé. Je pense que la possibilité de fraudes dans les bureaux est minimale", a déclaré Madan Dulloo, membre d'une commission d'observateurs de l'océan Indien.

Selon les observateurs, le scrutin s'est globalement déroulé dans le calme. Un responsable local a été abattu dans le sud de l'île, mais sa mort serait liée à des vols de bétail, sans rapport avec l'élection.

Les observateurs de l'Union européenne ont signalé de leur côté des problèmes d'inscription sur les listes électorales ou de matériel dans les bureaux de vote mais n'ont pas recensé de cas d'intimidation.

"Les conditions sont réunies pour un vote transparent et crédible", a déclaré Maria Muniz de Urquiza, chef de la mission de l'UE.

PAS PARFAIT

Andry Rajoelina, qui fait office de chef de l'Etat par intérim, n'a pas été autorisé par la commission électorale à présenter sa candidature.

Lalao Ravalomanana, l'épouse du président Marc Ravalomanana déposé il y a quatre ans par Andry Rajoelina, ne pouvait non plus participer au scrutin. Il en est de même pour Didier Ratsiraka, qui a jadis dirigé le pays.

Quant à Marc Ravalomanana, il ne s'est pas présenté. Son absence et celle du président Rajoelina sont censées contribuer au rétablissement de l'ordre.

Andry Rajoelina, un ancien disc-jockey âgé de 39 ans, est arrivé au pouvoir en organisant des manifestations violentes début 2009 qui ont abouti au renversement de Marc Ravalomanana, un millionnaire autodidacte, avec l'aide de l'armée.

L'enjeu de cette présidentielle est important. Les caisses de l'île productrice de vanille et de nickel sont pratiquement vides. Il s'agit de regagner la confiance des investisseurs internationaux, des touristes et des donateurs pour remettre sur pied une économie déstabilisée par les sanctions internationales imposées après le coup d'Etat.

Depuis le coup de force en effet, l'Union européenne, le FMI et la Banque mondiale ont gelé leur aide à Madagascar, dont 90% des 22 millions d'habitants vivent avec moins de deux dollars par jour.

Quant aux investissements directs étrangers, ils ont plongé de 1,36 milliard de dollars en 2009 à 460 millions cette année, selon la Banque mondiale.

Les candidats ont sillonné la Grande Ile pendant la campagne électorale, multipliant les promesses en matière d'éducation, de gestion des ressources minérales et de lutte contre la corruption.

Tout en ne participant pas au scrutin, le président sortant et son rival déchu ont été présents lors de la campagne.

Marc Ravalomanana, qui est toujours en Afrique du Sud où il s'est réfugié après son éviction, a apporté son soutien à Jean-Louis Robinson, qui fut ministre sous sa présidence.

Andry Rajoelina n'a pas officiellement pris parti pour un candidat en particulier. Mais deux d'entre eux, Hery Rajaonarimampianina, un ancien ministre des Finances, et Edgard Razafindravahy, sont considérés comme des proches du président sortant.

"Nous prendrons toutes les précautions nécessaires pour éviter de nouveaux troubles", a dit Andry Rajoelina après avoir voté, qui avait à l'origine promis une élection fin 2010.

"Tout le monde sait que le vote ne peut pas être parfait, mais tout le monde joue le jeu", a commenté Lydie Boka de la société française StrategiCo, spécialisée dans l'analyse et la prévention financière. "Compte tenu des circonstances, c'est peut-être ce qu'ils peuvent faire de mieux." (Danielle Rouquié, Jean-Stéphane Brosse et Henri-Pierre André pour le service français)