par Emmanuel Jarry

Devant 2.500 décideurs réunis dans la station de ski suisse de Davos pour le 40e forum économique mondial, le président français a de nouveau souhaité la moralisation et la régulation du capitalisme financier, dont il a dénoncé les dérives, les "exigences exorbitantes de rendement" et les "profits excessifs".

"La grande leçon c'est que demain, il faudra de nouveau compter avec les citoyens dans tous nos pays", a-t-il déclaré dans un discours de 40 minutes.

Le monde de demain, a-t-il estimé, devra compter avec des exigences beaucoup plus grandes en faveur de revenus proportionnels aux mérites, en matière de justice, de protection, de dignité et de morale.

"On n'a pas le choix", a-t-il poursuivi. "Ou bien nous changerons de nous-mêmes ou bien les changements nous seront imposés par les crises économiques, par les crises politiques et par les crises sociales. Faisons le choix de l'immobilisme et le système sera balayé et il l'aura mérité."

"Ou bien nous serons capables par la coopération, par la régulation, par la gouvernance de répondre à la demande de protection, de justice, de loyauté, ou bien nous aurons le protectionnisme, la fermeture et le chacun pour soi."

Nicolas Sarkozy a souhaité que les engagements pris par le G20, notamment en matière de réforme des normes comptables et de règles prudentielles pour le système bancaire, soit effectivement mis en oeuvre.

UN "NOUVEAU BRETTON WOODS"

Il avait salué auparavant les mesures prises par le président américain Barack Obama pour dissuader les banques américaines de spéculer ou de financer des fonds spéculatifs.

Cela ne l'a pas empêché de demander un alignement des règles prudentielles des banques américaines et asiatiques sur celles des banques européennes.

"S'il ne reste rien de la crédibilité du G20, c'est l'amorce d'un gouvernement économique mondial que nous perdrons et ça sera une catastrophe", a-t-il dit en menaçant de prendre à témoin l'opinion publique mondiale.

Faute d'audace pour réformer les systèmes de protection sociale, assainir les finances publiques, lutter contre la fraude fiscale, investir pour l'avenir, la reprise économique "ne sera qu'un répit", a-t-il également averti.

Nicolas Sarkozy a de nouveau appelé de ses voeux un "nouveau Bretton Woods" et réaffirmé son intention d'inscrire la réforme du système monétaire international au menu des sommets du G8 et du G20 que la France accueillera en 2011.

Au total, il a souhaité en finir avec "un système sans règle qui tire tout le monde vers le bas" pour le remplacer par des règles "qui tirent tout le monde vers le haut", tout en reconnaissant que son statut de français le rendait "suspect".

Nicolas Sarkozy n'a pas hésité à solliciter les applaudissements, comme lorsqu'il a jugé "moralement inacceptable" pour un dirigeant d'entreprise de gagner beaucoup d'argent s'il contribue à détruire des emplois et des richesses.

"Merci aux deux personnes qui ont applaudi cela", a-t-il lancé dans un silence presque total. Il remerciera plus tard les applaudissements saluant la fin de son discours, parce qu'ils mettent "en valeur la partie de la salle qui ne se lève pas".

Après quoi, il a néanmoins tenu à ajouter une conclusion improvisée à son allocution, pour se réjouir de ce que les différences entre Anglo-saxons et Européens continentaux "s'estompent complètement".

"Face aux grand problèmes, on s'est retrouvés à égalité", a souligné Nicolas Sarkozy, qui était le premier président français à s'adresser en personne au Forum de Davos.

Edité par Gérard Bon