-Par Stephen Fidler, The Wall Street Journal

Le déclassement de la note souveraine de la France par Standard & Poor's, confirmé vendredi par le ministre de l'Economie et des Finances, François Baroin, risque de saper la stratégie de sortie de crise de la zone euro. Car cette décision va fortement réduire la capacité d'emprunt de son actuel fonds de secours: le Fonds européen de stabilité financière (FESF), également menacé d'une dégradation.

Chaque abaissement de la note d'un pays de la zone euro l'affaiblit inéluctablement. Avant même ce déclassement, les analystes estimaient déjà que le FESF n'était pas doté de ressources suffisantes pour faire face à la crise. Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a d'ailleurs évoqué cette semaine la difficulté du FESF à attirer des investisseurs privés. De leur côté, le président français Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande, Angela Merkel, ont engagé la Banque centrale européenne à soutenir le FESF pour le rendre plus efficace.

Jusqu'à présent, le FESF a emprunté sur la base de 440 milliards d'euros de garanties apportées principalement par six pays bénéficiant jusque-là de la note maximale AAA: l'Allemagne, la France, les Pays-Bas, l'Autriche, la Finlande et le Luxembourg.

Cependant, le déclassement de la France réduira à lui seul d'environ 150 milliards d'euros le montant des garanties apportées par des pays notés AAA. L'Autriche, dont la note était également menacée, représente 20 milliards d'euros de garanties supplémentaires.

Les engagements de prêts - à l'Irlande et au Portugal - s'élèvent actuellement à 43,7 milliards d'euros. Compte tenu des fonds qui devront être apportés au deuxième programme d'aide à la Grèce et à la recapitalisation des banques dans d'autres pays, les engagements du FESF devraient augmenter pour atteindre 100 à 150 milliards d'euros, ce qui n'épuiserait pas encore les garanties AAA dont il dispose.

Les pays de la zone euro ont convenu de plans pour démultiplier la capacité du FESF et renforcer son influence sur les marchés obligataires des pays en difficulté. Deux moyens seraient employés: la garantie d'une partie de la valeur des obligations du fonds et le co-investissement avec d'autres entités publiques, comme des fonds souverains.

Mais si le FESF perd les garanties françaises, alors la base sur laquelle repose son effet de levier diminuera en conséquence. Dès le départ, certains analystes ont mis en doute les plans de maximisation du FESF. Le déclassement ne fera qu'accroître ce scepticisme.

L'impact du déclassement par Standard & Poor's ne se fera peut-être pleinement sentir qu'une fois que d'autres agences de notation lui auront emboîté le pas. D'ici là, le FESF pourrait techniquement se présenter comme un émetteur AAA. Toutefois, les coûts d'emprunt du FESF ont déjà commencé à augmenter par rapport à ceux de l'Allemagne. Et ce, avant même que le déclassement soit confirmé.

(Eric Chalmet a contribué à cet article)