par Ghaith Shennib et Feras Bosalum

TRIPOLI, 18 février (Reuters) - Deux puissantes milices libyennes ont lancé mardi un ultimatum de quelques heures au Parlement provisoire pour le contraindre à céder le pouvoir, l'une d'elles menaçant le Congrès général national (CGN) d'une intervention imminente.

Depuis son élection en juillet 2012, dix mois après la chute de Mouammar Kadhafi, le CGN est paralysé par les conflits entre les élus de l'Alliance des forces nationales, majoritaire, et le Parti de la justice et de la construction, l'aile politique des Frères musulmans en Libye.

Sa décision, annoncée début février, de prolonger son mandat, censé expirer le 7 février, afin de permettre à une commission de rédiger une nouvelle Constitution, a suscité la colère dans le pays, notamment au sein de certaines milices issues de la révolution de 2011 qui ont conservé leurs armes depuis. Le CGN a promis lundi des élections "dès que possible", sans avancer de date.

Deux de ces milices, la brigade Al Kaka et la brigade Al Saouaïk, ont donné mardi cinq heures au CGN pour renoncer au pouvoir en l'accusant de vouloir "restaurer la dictature".

L'ultimatum a expiré sans conséquence immédiate.

Le commandant de la brigade Kaka a cependant déclaré que ses troupes étaient en contact avec d'autres groupes armés en vue d'intervenir à tout moment contre le CGN.

"Nous allons agir bientôt et remettre le pouvoir à la Cour suprême et constituer des commissions chargées de superviser les élections", a dit Osmane Mlekta, interrogé au téléphone par Reuters.

"Nous allons agir avec le peuple et nous sommes en contact avec des gens dans sud et l'est (de la Libye)", a-t-il ajouté.

Osmane Mlekta a affirmé qu'une partie de ses troupes avait progressé mardi après-midi à bord de véhicules blindés sur la route de l'aéroport international de Tripoli, confirmant ainsi ce qu'un témoin avait déclaré auparavant à Reuters.

La capitale était calme mardi soir.

MANIFESTATION À L'AÉROPORT DE BENGHAZI

Le président du CGN, Nouri Aboussahmaïn, a qualifié ces menaces de tentative de coup d'Etat.

"Le CGN a donné des instructions à l'état-major pour qu'il prenne les mesures nécessaires afin de s'occuper de ce groupe", a-t-il déclaré lors d'une séance retransmise à la télévision. "Le CGN a obtenu la confirmation du chef de l'armée et des révolutionnaires qu'ils défendraient sa légitimité."

La persistance des troubles politiques et sociaux dans un pays à la structure tribale très marquée freine la transition de la Libye vers un régime démocratique, le but affiché par le CGN, et pèse sur la production de pétrole, sa principale ressource, en raison des occupations de terminaux et de gisements.

La production a chuté à 375.000 barils par jour (bpj), a déclaré un porte-parole de la compagnie publique National Oil Corp (NOC). Elle était de 1,4 million de bpj en juillet.

A Benghazi, la grande ville de l'est du pays d'où est partie la révolution en 2011, des membres d'une unité chargée de la protection de l'aéroport ont occupé la piste mardi et empêché pendant six heures le personnel d'entrer dans le terminal passagers, a dit un responsable du site.

Ces vigiles affirment ne pas avoir été payés depuis plusieurs mois. Ils ont mis fin au blocage après avoir obtenu l'assurance des autorités que leurs revendications seraient examinées. (Avec Ayman al-Warfalli et Ulf Laessing; Bertrand Boucey pour le service français)