Berne (awp) - La grande banque UBS ne sera pas sanctionnée malgré son implication dans des accords illicites sur le marché des changes. Après l'Union européenne, la Commission de la concurrence (Comco) a également exempté de toute pénalité financière le groupe zurichois, qui a dénoncé l'entente. Le sort de Credit Suisse doit encore être tranché.

Au terme de l'enquête, cinq établissements étrangers ont écopé d'une amende totale de 90 millions de francs suisses pour entente illicite, indique la Comco jeudi. Barclays, Citigroup, JP Morgan, MFUG Bank et RBS ont participé à deux cartels différents. Certains courtiers ont manipulé le cours du dollar, de l'euro, de la livre sterling ou encore du franc en coordonnant leurs actions via des messageries électroniques.

La banque britannique Barclays devra s'acquitter d'une pénalité de 27 millions de francs suisses, les américaines Citigroup et JP Morgan écopent d'une sanction respective de 28,5 millions et 9,5 millions, contre 1,5 million pour la japonaise MUFG Bank et 22,5 millions pour Royal Bank of Scotland.

Les faits s'étalent sur une période comprise entre 2003 et 2012. Pour arriver à sa décision, la Comco a dû éplucher quelque 77 millions de pages de communications électroniques. Les courtiers affublaient leurs groupes de discussions de noms farfelus à l'instar de "Three Way Banana Split" (banana split à trois) ou "Semi Grumpy Old Men" (vieillards semi-grincheux).

UBS a également pris part à ces agissements entre 2009 et 2012, affirme le gendarme de la concurrence.

La Suisse, Pays de Cocagne

Certaines de ces banques se sont autodénoncées et ont profité de remises partielles de sanction. Les décisions peuvent faire l'objet d'un recours au Tribunal administratif fédéral.

Mi-mai, Bruxelles avait infligé une amende de 1,07 milliard d'euros pour entente sur les opérations de change en dollars aux établissements Citigroup, JPMorgan, Barclays, RBS et MUFG. UBS avait déjà échappé aux poursuites pour avoir dénoncé ces agissements à la Commission européenne. Cette dernière avait ouvert une enquête en 2013.

Les 90 millions de pénalités financières en Suisse paraissent dérisoires face au milliard infligé par la Commission européenne, surtout pour des banques qui pourront très facilement absorber ces amendes.

"La sanction dépend du marché sur lequel les banques étaient actives, où elles ont conclu le cartel. Si le marché ne correspond qu'à une petite partie de l'activité, la pénalité ne sera pas très élevée", a expliqué à AWP Patrik Ducrey, directeur de la Comco. Pour M. Ducrey, les 90 millions respectent cette proportionnalité.

"Aucune infraction"

Le patron de la Comco justifie également la décision concernant UBS. "C'est l'idée du législateur: celui qui s'annonce en premier et qui dénonce un cartel profite d'une sanction réduite à zéro. Il s'agit d'une incitation à aller vers l'autorité."

La Commission de la concurrence enquêtait également sur d'autres établissements suisses. Les procédures lancées contre la Banque cantonale de Zurich et Julius Bär ont été classées sans suite.

En revanche, le couperet n'est pas encore tombé pour Credit Suisse. La procédure porte sur de possibles agissements illicites remontant à 2012. Il existe suffisamment d'indices pour poursuivre les investigations, selon Patrik Ducrey. L'enquête ne devrait pas être conclue avant l'année prochaine.

Dans une prise de position écrite à AWP, la deuxième grande banque suisse réfute toute infraction. L'établissement zurichois avait conduit une enquête à l'interne qui avait permis d'exclure toute entorse au droit des cartels en Suisse, rappelle-t-il.

fr/al